Raconter des histoires.


Tarsem SINGH nous invite à travers ce film à questionner ou explorer l'ensemble des éventualités qu'englobe cette simple phrase.

Narrer un conte imaginaire avec une finalité qui va s'inscrire dans un arc situé du simple désir de divertir jusqu'à la visée pédagogique. Faire le récit d'une vie ou d'une péripétie précise dans le but de laisser un témoignage. Mentir que ce soit dans son intérêt ou pour essayer de protéger un esprit fragile d'une réalité. Partager avec des êtres chères les moments du quotidien que ces mêmes êtres chers n'ont pu vivre avec nous. Il existe une quasi infinie possibilité derrière cette phrase anodine.


Le film embrasse ainsi un spectre large de l'art de l'histoire contée. L'improbable amitié que tisse le film entre un cascadeur victime d'une chute et une petite fille tous les deux en convalescence dans le même hôpital, va s'opérer via le truchement d'un récit imaginaire que le premier va créer devant, tout autant la petite que le spectateur. Dans quel but ?


Car si la petite Alexandria, qui m'a offert comme un cadeau précieux la prestation absolument charmante de la jeune Catinca UNTARU, incarne l'innocence de l'auditeur prêt à accepter comme tangible et possible ce que le narrateur va choisir de lui dire, c'est surtout à mon sens la position du conteur qui est notable. Lee PACE à travers son personnage de Roy Walker érige en réalité un plan rusé pour parvenir à ses fins. Son dessein, même s'il n'apparait pas immédiatement de façon claire à nos yeux, l'on pressent assez vite que derrière cette velléité à amuser ou faire rêver cette camarade de repos forcé, se cache autre chose de moins noble.


Mais pour l'instant le film développe la partie fantastique, fantasmagorique, du procédé mis en place. Alexandria n'est pas une petite fille crédule mais une petite fille ouverte à l'imaginaire. Roy n'est pas le manipulateur mais l'auteur d'un monde merveilleux, fait d'aventures, de héros, de méchants, de quêtes, de décors et de costumes somptueux. Jusque quand ? Je vous laisse la plaisir de découvrir par vous même comment le film parvient avec une finesse qui m'a conquis à retourner le processus ou pas.


Il faut absolument dire un mot sur la direction artistique du film, les séquences se déroulant dans l'histoire imaginée à l'intérieur de cette histoire racontée, sont superbes, la richesse des costumes nous renvoie à l'imaginaire de nos contes d'enfance, la variété des personnages nous illustre la richesse de l'humanité et la beauté des décors nous rappelle la beauté du monde. Les décors nous transporte dans des endroits qui existent dans notre monde, le Taj Mahal par exemple ou d'autres lieux iconiques, de ces lieux qu'on connait tous au moins par image à défaut d'y avois mis les pieds et qui soulèvent en nous maints imaginaires à leurs simples évocations.

Le film est à la fois rythmé et contemplatif, la mise en scène sait se poser pour nous plonger dans son univers merveilleux, il sait aussi nous faire toucher le merveilleux de l'ennui qui suspend notre vigilance pour ensuite mieux nous récupérer et nous engager dans l'action.


Une autre possibilité du "raconter des histoires" explorée par le film est celle du cinéma, le film regorge de clins d'œil et d'hommages à cet art, que ce soit par des plans ou des séquences précises qui ne manqueront pas de vous évoquer d'autres films, je pense en particulier à une saynète qui m'a rappelé une des séquences du documentaire de Ron FRICKE Baraka (1992) avec qui il partage outre le pouvoir d'émerveillement, la multiplicité des endroits dont regorge notre monde qui pourraient ou sont les décors de tant d'histoires racontées ou restant à raconter.

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le 9 juin 2024

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