Takehiko Inoue revient à Slam Dunk, après un hiatus de vingt-sept ans. Le triomphe du manga (170 millions de tomes écoulés à ce jour) lui a donné la liberté choisir ses projets et son rythme de parution. Depuis la fin des années 90, il a deux séries toujours en cours - Vagabond et Real (consacré au handibasket). Pourquoi céder maintenant aux sirènes du film d'animation ? Tout simplement parce qu'il est cette fois-ci aux commandes, contrairement aux précédents longs-métrages produits entre 1994/1995 sans parler de la série animée. Si le projet d'un film a fait plusieurs allers-retours entre Toei animations et Inoue, cela s'expliquait essentiellement par une question de rendu. L'évolution graphique entre le début et la fin du Slam Dunk permet de mesurer à quel point le style de Inoue a mué vers plus de réalisme et d'intensité. Pour lui, hors de question de revenir à l'esthétique rétro et aux couleurs pétantes de l'animé. Très au fait des perspectives offertes par les nouvelles technologies, Inoue aborde The First Slam Dunk comme un nouveau terrain de jeu. Son ambition, il la fixe dès les premières secondes. On devrait siffler le passage en force tellement on se la prend de plein fouet.
Inutile d'être un fan de la première heure pour apprécier le spectacle. Inoue a bien compris que le cinéma est une forme d'expression plus directe, moins extensible. Il épure la narration, en éjectant pas mal de gags et de moments suspendus. Le match de basket qui couvre une grosse partie du long-métrage est une claque esthétique. The First Slam Dunk bénéficie de cette communion entre 2D, 3D et motion capture et nous immerge directement sur le terrain. Une pointe de vitesse souffle sur place, un contre est un choc, un rebond devient un moment de pure sidération, et on prend presque les paris sur la prochaine passe. Si vous aimez terminer les rencontres sportives l'estomac noué et la sueur perlant du front, ce film est fait pour vous. Cependant, Inoue n'oublie pas aussi de parler au cœur. Au lieu de tenter une percée hasardeuse vers la suite, le mangaka/réalisateur/scénariste préfère le pas de côté et se concentre sur un second-rôle laissé de côté pour redonner un peu d'air à son univers. Il est toujours question de dépassement de soi et du faire ensemble mais aussi de surmonter sa peine. À travers l'histoire de Ryota, le film peut couvrir un angle inédit et progressivement rassembler toutes les pièces du puzzle sans jamais trahir le manga. Il est évident qu'un fan se sentira plus en phase avec les personnages ou certains tournants dramatiques. D'autant que Inoue fait le choix d'espacer certains flashbacks au risque de déséquilibrer un peu le rythme, et de garder le héros du manga (Sakuragi) et son rival (Rukawa) un peu à distance. Le spectateur néophyte comprendra les relations entre chaque personnage mais pourra éventuellement s'étonner de ne pas avoir plus d'informations concernant certains alors que d'autres ont droit à plus d'égards. La décision est compréhensible mais elle se fait au détriment d'une position d'égalité entre non-connaisseurs et affranchis. Rien qui n'empêche néanmoins de prendre son pied sur ce superbe geste de cinéma. Fans du manga, fans de cinéma, fans de sport, fans d'animation, vous pouvez y aller les yeux bien ouverts. Et au cas où, prière de sécher vos larmes en ressortant. Et de respirer un grand coup.