Drôle de sensation en sortant de la salle. Je n'ai vu que Fantastic Mr. Fox de Wes Anderson et pourtant j'ai l'impression de réussir à cerner dans ce seul film son univers. L'image, la lumière, les couleurs ou les costumes donnent à ce long-métrage un grand esthétisme. On est d’emblée saisi par les décors. Tantôt maquettes, tantôt images de synthèses ou intérieur d'un grand magasin, tout concourt à donner à cette république imaginaire de Zubrowka et son enclave luxueuse une saveur particulière.
L'histoire est une mise en abime de mise en abime. Le premier plan est une jeune femme qui se recueille avec son livre "the Grand Budapest Hotel" devant la statue d'un écrivain décédé. Puis on effectue un premier saut dans le temps. Cet écrivain raconte à un homme de passage dans l’hôtel (Jude Law) son histoire. Commence alors la véritable épopée du Grand Budapest Hotel. Monsieur Gustave H. (Ralph Fiennes), concierge charismatique mène à la baguette l'établissement. Escort Boy pour les vieilles clientes fortunées, il s'enamoure de la femme la plus riche du pays: la comtesse Céline Villeneuve Degoffe und Taxis. Celle-ci lui fait part de ses inquiétudes quant à sa vie, et en effet, alors qu'il prend Zero comme son nouveau lobby boy, elle décède de manière mystérieuse dans son château. Ensemble, ils vont se rendre à la lecture de son testamentet pour découvrir que Monsieur Gustave doit hériter d'un tableau d'une valeur inestimable. La famille de la vieille comtesse et en particulier son fils (Adrian Brody génial en sombre aristocrate vengeur) va tenter de récupérer ce qu'elle croit sien. Ce dernier envoie son fidèle Jopling (Willem Dafoe une fois de plus au top) pourchasser/assassiner les deux compères.
L'histoire un peu rocambolesque n'est pas sans rappeler l'univers des dessins animés. D'ailleurs, le film emprunte beaucoup des codes du cartoon et en particulier son humour. Les couleurs aussi rappellent cet univers. L'hôtel est d'un rose bonbon chatoyant. Il ressemble à un gros gâteau de chez Bendel's (pâtisserie imaginaire du film) nappé d'un glaçage rose. Il contraste avec l'austérité de la demeure de la comtesse ainsi que des costumes de ses occupants. Ce château inquiétant qui envoie ses sbires faire la loi est en quelque sorte une métaphore de l'Allemagne nazie qui grandit dans une Europe vivant alors dans l'illusion de sa gloire passée que symbolise l'hôtel. Cependant, le film ne semble pas faire de ces sous-entendus historiques son fond de commerce. C'est avant tout une bonne comédie avec de bons acteurs qui ne semblent pas se prendre au sérieux. Adrian Brody, Willem Dafoe, Ralph FIennes ou encore Bill Murray (apparition éclair) jouent tous sur le second degré, en particulier Willem Dafoe qui signe une performance remarquable en tant qu'assassin sombre et énigmatique.
Finalement, ce film ne peut pas laisser indifférent. Pour ma part, j'ai bien accroché. L'ambiance, les couleurs, tout l'univers qu'a créé Wes Anderson m'a fasciné. On est vraiment transporté dans sa république imaginaire et l'on n'a envie que d'une chose: déguster une pâtisserie Bendel's dans sa suite du Grand Budapest Hotel.