Collaborateur attitré de Joachim Trier, Eskil Voigt s'était déjà signalé à la réalisation avec le sensoriel et anxiogène Blind, en 2015. Avec son deuxième long-métrage, The Innocents, qui nous remet en mémoire le remarquable film de Jack Clayton (1961) qui porte le même titre, le cinéaste norvégien passe à l'échelon supérieur avec une œuvre qui démontre que le fantastique tendance horrifique, quand il est maîtrisé et original, peut déboucher sur des réussites incontestables. The Innocents, c'est l'enfance du mal, un film qui avance progressivement du ludique vers le monstrueux, le tout dans une ambiance estivale, entre HLM, terrain de jeux et forêt. Ce n'est pas la première fois au cinéma que des enfants exploitent des dons surnaturels au service de l'effroi mais The Innocents a pour lui de parfaitement canaliser ses effets sans pour autant nous épargner quelques scènes d'une rare cruauté et perversité. Il y a quelque chose du Village des damnés dans le film d'Eskil Vogt, dans le sens où le spectateur est à la fois tenté instinctivement de protéger les enfants et de redouter à chaque instant de les voir manifester leur pouvoir maléfique. Chacun des protagonistes, dans The Innocents, a sa propre personnalité et 'morale" avec parmi eux une fillette autiste, réceptacle étrange des déviances de ses petits camarades. Si le film est aussi impressionnant, il le doit autant à la mise en scène, qui joue subtilement avec la lumière, qu'à l'interprétation des enfants, d'une incroyable intensité.