Scénario du co-auteur de "La fureur de vivre" délibérément abandonné pour s'en remettre à l'improvisation, tournage et montage déjantés et épiques. Le film est avant une oeuvre insoumise, impressionniste, libre, suicidaire mais se pensant pionnière, contestant la vision artistique médiocre de l'empire hollywoodien: contrôle autoritaire des auteurs sous contrat, industrie du divertissement standardisé. Grammaire narrative traditionnelle transgressée en large et en travers, jusqu'à soustraire l'épilogue, dans une dialectique floutant constamment dimension fictionnelle et principe de réalité. Mon opinion reste indécise au sujet du détournement des villageois substituant fascination mystique pour le cinéma à la foi catholique, tandis que le prêtre lui-même adoptera la nouvelle spiritualité de ses fidèles: faut-il y voir une libération démocratique ou un méfait colonial ? S'ajoute une dénonciation de l'arrogance matérialiste occidentale, corruptrice, vis-à-vis du tiers-monde (le couple près de la cascade, tels Adam et Ave, envisageant l'aménagement touristique du site sitôt passée leur étreinte).
Ce n'est pas tant le fractionnement du récit qui pêche que le manque de rigueur dans la déconstruction de l'assemblage narratif qui déçoit. Si on compare à "Week-end" de Godard...