Richard III, dernier roi Plantagenêt d'Angleterre, ayant dirigé son pays de 1483 à 1485, soit jusqu'à sa mort lors de la bataille de Bosworth. Cette dernière a permis à un certain Henri Tudor de ceindre la couronne sur sa tête, de prendre pour nom de monarque, Henri VII, et de fonder une nouvelle dynastie. Ouais, prendre ce qui appartient à un rival, sans la moindre once de légitimité, ça ne pue pas la grande classe. D'où la nécessité d'avoir mis en branle toute une propagande pour justifier son accession illégitime au trône et le maintien sur celui-ci de ses descendants.
Et cela ne pouvait que passer par une peinture horrible du défunt adversaire. Ben oui, l'histoire est écrite par les vainqueurs. Et ce qui est trop bien avec les morts, c'est qu'ils n'ont pas la possibilité de se défendre. Richard III était un tyran qui s'astiquait rien qu'à l'idée d'être le plus diabolique possible. Et, en plus, il était bossu... oh, mon Dieu... un bossu, c'est forcément méchant. Vade retro Quasimodo. Ben oui, elle n'allait pas mettre en avant que le monsieur pouvait être certes cruel (tous les êtres de pouvoir de son époque étaient obligés de l'être un peu de toute façon !), mais que, dans le même temps, lors de son très court règne, il avait fait adopter de nombreuses lois judiciaires et administratives pour améliorer le quotidien de son peuple, auprès de qui il était populaire ; c'était un homme d'État solide et compétent. Et toute cette imagerie négative a perduré jusqu'au XXe siècle. Même, maintenant, pas mal de personnes s'entêtent à ne pas aller au-delà du psychopathe de la pièce d'un nommé William Shakespeare (qui a rédigé son œuvre lors de la période élisabéthaine, donc liée à Elisabeth Ire... une Tudor !).
Alors quand j'ai appris que Stephen Frears avait réalisé un film sur la recherche et la découverte, par une femme opiniâtre et passionnée, du corps de ce roi, sous un parking, avec en toile de fond sa réhabilitation, j'étais dominé par la satisfaction. Après le visionnage, nettement moins.
Vous l'aurez compris, l'ensemble s'inspire d'une histoire vraie, celle de Philippa Langley. Une histoire incroyable qui s'est étendue sur plusieurs années.
Déjà, le début souligne que l'écriture scénaristique n'est guère brillante. Le portrait d'une femme, atteinte d'un syndrome de fatigue chronique, mécontente de sa vie professionnelle, est vite expédié. La naissance de sa fascination pour Richard aussi. On a le sentiment qu'il suffit qu'elle voie une représentation théâtre, puis une fois le fantôme du souverain ou son apparition (c'est selon !) pour qu'elle se dise d'un coup "tiens, je vais aller me renseigner sur lui et chercher son corps !". Le tout aurait considérablement gagné à prendre un peu plus de temps, à être plus approfondi pour que le spectateur soit aussi sensible qu'elle à la cause que la protagoniste décide de défendre, pour qu'il saisisse, par ses propres émotions, l'importance que cette quête a d'essentiel pour elle, qu'elle lui insuffle une raison d'être à son existence.
Comme autre preuve de cette écriture scénaristique guère brillante, on peut citer comme exemple le fait que le personnage principal a lu huit biographies historiques sur le soi-disant infâme bossu et pourtant, après, lors d'une séquence se déroulant dans un pub, il a l'air d'apprendre des faits archiconnus sur le monarque... Euh, je sais que cette séquence a principalement pour but de fournir des informations à celles et ceux qui visionnent le film et qui ne s'y connaissent pas trop sur ces faits d'un passé lointain (il y avait sûrement des milliers d'autres manières plus pertinentes de le faire !)... mais, il y a une putain d'incohérence gênante là.
Reste que le pire est l'impression que toute l'intrigue se déroule sur quelques jours (alors qu'il y a une tentative de faire comprendre l'inverse, à travers la séparation maritale que connaît la protagoniste !) et non pas sur bien plus longtemps parce que le réalisateur ne parvient pas, par le biais de la grammaire narrative cinématographique, à intégrer cette idée.
Et pour ce qui est de la recherche en elle-même, notre héroïne ne semble qu'avancer que par les facteurs chance et révélations. Ce qui amenuit considérablement son mérite, son intelligence, ses qualités ; l'absence de perception du temps susmentionnée accentue encore plus ce défaut puisque ça injecte l'idée de facilité pour atteindre un objectif compliqué. Tout ceci retire au spectateur la sensation forte d'un accomplissement, celle qu'il aurait ressentie après un parcours du combattant de longue haleine.
Pour ce qui est des antagonismes, ils sont juste platement et caricaturalement incarnés par la morgue ainsi que par l'opportunisme des universitaires s'opposant, évidemment, à la passion ainsi qu'à la sincérité de la chercheuse autodidacte de dépouille royale. Ouais, pour la subtilité, la nuance, on repassera. Et le syndrome de fatigue chronique qui aurait pu faire un adversaire efficace, bien moins conventionnel ? Foutue au dixième plan.
Autrement, il y aurait pu y avoir une dynamique de récit efficace dans les échanges entre notre passionnée et le fantôme de Richard. Hélas, ce dernier se résume juste à prendre un air placide tout du long. D'accord, dans ce choix de direction d'acteur, il y avait la volonté de montrer le monarque constamment majestueux, digne, mais ça ne fait que rendre sa silhouette uniforme, donc vide, donc juste là pour occuper le cadre.
Bordel, il y avait un potentiel de puissance extraordinaire à côté duquel The Lost King passe totalement, parce que c'est mal raconté.
La mise en scène téléfilmesque, se contentant d'enregistrer sans la moindre once d'originalité, d'audace, de créativité, d'ampleur enfonce définitivement le clou.
Sally Hawkins a beau donner le meilleur d'elle-même, il est impossible à elle toute seule de relever un niveau aussi bas.
Les intentions étaient bonnes, mais Richard méritait beaucoup mieux.