1983, troisième et dernier opus de la trilogie britannique The Red Riding, à la dure tâche de clore une saga jusque là très moyenne. Épousant le polar ultra classique au rythme soporifique, aucun des deux précédents cinéastes n'avaient véritablement convaincu. On s'attendait donc logiquement au pire pour ce chapitre final, spécialement par le choix du nouveau metteur en scène : Anand Tucker, assez méconnu. D'autant qu'il est le seul à ne pas avoir lu la série de romans policiers dont la trilogie est adaptée. Et là, miracle : le film est bon. On l'avait pas vu venir mais l'évidence se fait tout du long : c'est bien plus complexe que les deux premiers, bien plus audacieux dans la mise en scène et dans la narration, le casting est supérieur (Mark Haddy en tête), le scénario tient mieux la route. 1983 n'est pas exempt de tous défauts, loin de là, mais il cumule nombre de qualités qui en fait, de loin, l'opus le plus cohérent jusque à présent.
La faiblesse des deux premiers ne rendait pas la tâche difficile , certes, mais son apport à la saga est indéniable. Enfin mis en scène, le polar offre autre chose qu'auparavant : du souffle, de vrais personnages, un drame social approfondi. Il faut dire que l'histoire ne nous perd pas vraiment, elle reprend les personnages, les enjeux du premier film sous des points de vus différents. Écarté de la vision purement littéraire d'un roman qu'il n'a pas lu, Tucker croise de nombreuses destinées sur une période de plus de dix ans et fait l'aller-retour entre les événements. La narration ne s'en porte que mieux, exit la linéarité pataude des précédents : place au récit déstructuré. Le changement ne se fait pas sans mal, le réalisateur rencontre notamment des difficultés à maîtriser une chronologie qui alterne les époques et passe de l'une à l'autre sans indice distinctif autre que la compréhension du scénario. On a parfois des soucis à tout replacer, mais le reste l'emporte aisément.
Plus léchée, plus lumineuse, la photo est, mieux vaut tard que jamais, enfin à la hauteur. Elle permet une ambiance désespérée, d'une noirceur stylisée. Dans le même ton, contrairement à 1974 et 1980, la lenteur ne fait pas défaut, le sentiment funeste non plus, elle sert le propos, les événements, renforce les enjeux dramatiques, prend le temps d'éclaircir les zones d'ombres du premier. Dommage qu'Anand Tucker n'eût pas été l'unique cinéaste de la trilogie, l'ennui nous aurait moins souvent emporté.
Certaines langues pourraient toutefois rétorquer que le cinéaste a eu la chance d'adapter le meilleur roman. A ceux là on pourra difficilement donner tort : qui sait ce qu'il aurait fait sur le reste des bouquins ? Personne ne le sait, on se contentera donc d'une dernière bonne note à cette trilogie au rendu global relativement décevant qui connaîtra bientôt son adaptation Américaine. En effet, Columbia aurait acquis les droits des romans pour en faire un film américain. L'optimisme est de mise, ils pourront difficilement faire pire.