Chronique d'un succès débridé
« The Rocky Horror Picture Show » est un film musical américain réalisé par Jim Sharman sorti en 1975. Il est l'adaptation de la comédie musicale de Richard O'Brien, créée à Londres en 1973. Richard O'Brien signe, pour les versions scéniques et cinématographiques, l'histoire, les personnages, les mélodies et les paroles. Il joue lui-même le personnage de Riff-Raff. On trouve à ses côtés les acteurs Tim Curris (l'excellentissime Dr Frank-N-Furter), Suzan Sarandon (Janet Weiss), Barry Botswick (Brad Majors) et bien d'autres comédiens déjà présents dans la comédie musicale originale. Le film fut présenté hors compétition lors du Festival international du film fantastique d'Avoriaz en 1976. À sa sortie, il est interdit aux moins de 12 ans, probablement parce qu'il est pas mal question de sexe dans ce film.
Si le film commence par une jolie demande en mariage, il se poursuit par une nuit d'orage qui amène la voiture en panne de nos deux héros, Janet et Brad, un couple coincé aux abords d'un mystérieux château. Obligés de se réfugier dans la demeure, ils vont faire la rencontre de ses occupants pour le moins bizarres, qui se livrent à de bien étranges expériences.
« The Rocky Horror Picture Show » rend hommage aux vieux films de série B, d'épouvante, d'horreur... On y parle aussi beaucoup de sexe sur fond de Rock & Roll. De nombreuses références cinéphiliques parcours cette fable fantaisiste, passant du fauteuil roulant du docteur Folamour de Kubrick, aux films d'horreur de la Hammer (tournés pour bon nombre dans les mêmes décors que le château du film), les tatouages LOVE et HATE sur les mains du personnage d'Eddie, le personnage de Riff-Raff fait penser au vampire de « Nosferatu », la création de Rocky l'homme parfait fait penser à celle de la créature du docteur Frankenstein...
Nombreux tableaux font également partie de ce décor chamarré, la « Joconde », le tableau « American Gothic » de Grant Wood... Les célèbres lèvres rouges du générique feraient écho à un tableau de Man Ray intitulé « Lips over hollywood ».
À sa sortie en salle, le film est un véritable échec. Il faut bien avouer que c'est un ovni inclassable et c'est peut-être ce qui a fait sa force par la suite. Pour rentabiliser sa production, il a donc été diffusé dans les célèbres séances de minuit. Ce qui a fait de lui aujourd'hui un film culte des « midnight movies » (ces films souvent à petit budget projetés tard dans la nuit à la télévision puis aux séances de minuit dans les cinémas américains pendant les années 70).
« The Rocky Horror Picture Show » possède désormais une base de fans énorme dans le monde entier.
Mais pourquoi ?
Tout d'abord, il détient le record de la plus longue sortie en salle de l'histoire du cinéma. Plus de 39 ans après la première projection, il fait encore partie de la programmation de plusieurs salles à travers le monde. Au fil des projection les fans ont été de plus en plus nombreux, connaissant les répliques et les chansons par coeur et venant assister à chaque diffusion. Ces fans ont commencé par rajouter des répliques à celles du film, pour en changer parfois le sens, puis ils sont venus au cinéma grimés en leurs personnages préférés, se mettant à chanter et danser dans la salle pendant la projection. Les projections ont alors pris des allures de véritables rituels, avec des « interprétations scéniques » en parallèle de la projection, souvent juste en dessous de l'écran. Ces événements très codifiés reprennent donc des éléments importants de l'intrigue. Un mariage signifie une pluie de riz sur les spectateurs, la pluie s'invite évidemment elle aussi. Pour cela en spectateur averti on s'est muni d'un journal...
Le spectacle est autant sur l'écran que dans la salle. On parle, on rit, on chante. Et tout cela avec bonheur et décontraction.
Ayant déjà vu le film au préalable, j'ai eu l'occasion d'assister à l'une de ces séances (organisée pour les 30 du cinéma Le Dietrich de Poitiers).
« The Rocky Horror Picture Show » est une oeuvre colorée, kitch, savamment impertinente, outrageusement sexy, indéniablement sexuelle. L'histoire est des plus acadabranteste, les effets spéciaux vraiment cheap, mais cela importe peu. C'est très libre et libérateur. Amateurs de portes jarretelles, de paillettes, de comédies musicales déjantées ne vous en privez pas. Ce film regorge de petits secrets et de références cachées ou non, dans un coin de la pellicule.
Une chose est sûre, cela ne vous laissera pas indifférent. Personnellement je ne m'en lasse pas.
« Don't dream it, be it ", dit l'une des chansons interprétées par le Docteur Frank-N-Furter... Ce serait peut-être ça finalement la morale de toute cette histoire.