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Succedanné de références, The Substance renvoie à Lynch pour le rejet de la monstruosité et la quête de l'amour de soi et des autres, à Carpenter pour l'artisanat des effets spéciaux et le plaisir de la déformation des corps, à De Palma pour les rêves brisés et un final à la Carrie au bal du Diable, à Aronofsky pour ce que le film pourrait être un Requiem for a Dream version 2024, à Kubrick pour les nombreux clins d'œil. Et à Cronenberg, bien sûr, pour à peu près tout.


Coralie Fargeat rappelle aussi, comme une évidence, Julia Ducourneau pour cette fascination qu'elles partagent toutes deux pour le film de genre et le body horror et leurs heureux destins cannois, qui ont révélé l'art français et féminin de la claque dans la gueule.


Mais impossible de se satisfaire de cet étalage réconfortant de ressemblances et références, puisque le film sait tirer son épingle du jeu codifié de son genre grâce au jusqu'au boutisme de sa réalisatrice, cette force qui la pousse à aller toujours plus loin dans l'univers qu'elle bâtit.

En effet, à l'inverse de sa contemporaine et compatriote Ducourneau, Coralie Fargeat ne s'encombre pas de dialogues ou de mise en contexte : elle plonge son spectateur de manière brutale et assumée dans un univers marqué et ponctué de repères, qu'elle filme en très (très) gros plans et bourre de bruitages excentriques, et le prend par le bras pour foncer avec lui tête baissée vers le plus en plus trash, le plus en plus fou, le plus en plus délirant (les critiques ne manqueront d'ailleurs pas de superlatifs et d'adjectifs).

L'heureuse originalité de The Substance vient donc de son approche agressive, rentre-dedans, des thèmes qu'elle convoque pour mieux les dynamiter (fantasme du corps féminin et sa sur-sexualisation à outrance avec laquelle elle s'amuse, hypocrisie du show business incarnée par un producteur carnassier, Dennis Quaid en hilarante roue libre) et de l'humour qui s'en dégage et fait régulièrement mouche. En dépassant la simple expérience gore et le délire grand-guignolesque assumé, elle livre une œuvre sincèrement engagée, sans finesse certes et sans éviter des maladresses et des longueurs malgré un rythme caracolant. L'incarnation de cette sincérité c'est peut-être les deux comédiennes, Demi Moore et Margaret Qualley, touchantes par le fait même d'avoir accepté ces rôles complexes qui marqueront certainement leur carrière et dans lesquelles elles s'amusent à massacrer leur beauté.


The Substance est en fait ni plus ni moins un conte moderne, une digestion débordante de références qui se libère de ses codes pour s'en créer de nouveaux, et éructe à la gueule de chacun sa morale, basique mais bienvenue, par tous les moyens qui lui sont donnés, le plus fort et le plus frontalement possible. Pour cette audace, il mérite quelques célébrations.

Charles_Dubois
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le 18 oct. 2024

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Charles Dubois

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