Elisabeth, ancienne étoile du cinéma recyclée en présentatrice d’émission d’aérobic, voit sa carrière définitivement arrêtée par l’industrie qui ne lui pardonne plus son passage dans la cinquantaine.

Désespérée, elle expérimente The Substance, un protocole de produits à s’injecter lui permettant de se dédoubler pour habiter une nouvelle enveloppe corporelle plus belle, plus jeune, et ce une semaine sur deux.

Très vite, les semaines de vie passées avec son nouveau corps baptisé Sue deviennent plus palpitantes et la tentation de ne pas revenir vers son corps vieillissant plus présente.

Seulement il y a des règles pour utiliser la Substance, et des conséquences si elles sont enfreintes…

TIN-NIN-NIN



C’est dynamique, les 2h20 passent de façon digeste. Le message est peu subtile tout en restant efficace. Le style imprimé aux décors rappellent plusieurs autres réalisateurs (en vrai je m’en fous) et réussi à devenir propre à lui-même.

J’ai aimé cette thématique du vieillissement. Demi Moore ne m’a jamais paru comme étant une grande actrice ou ayant un grand charisme mais le fait qu’elle et son double ne peuvent se rencontrer limite les dialogues et a donc peut-être contribué au fait que je l’ai trouvée bien dans ce film. Je suis même admirative du fait qu’elle ait accepté un tel rôle. Ça ne doit jamais être évident pour un acteur de manière générale de se mettre à nu mais une femme âgée ça doit être pire, surtout quand t’as été un temps une icône répondant aux critères physiques en vogue. Chaque fois qu’on voyait son visage de près, ses rides, son botox, ses parties du corps plus flasques, moins harmonieuses je me demandais comment elle l’a vécu, si c’était dur. Surtout que tout le film est basé sur l’analyse scrupuleuse de ce qu’on n’aime pas voir et le contraste avec le corps généreux, ferme et surtout jeune de Margaret Qualley.

Dennis Quaid également. Les plans qui le montrent avec une image déformée qui soulignent son gros nez, sa salive quand il mange, ses bruits de bouche, son visage à la peau dégueulasse. Vraiment il illustre le gros porc de manière appuyée (comme tous les hommes du film).

La seule différence c’est que je trouve que justement pour moi ça a dû être appuyé par plein d’artifices pour qu’on le voit comme ça alors qu’Elisabeth (Demi) est montrée de manière peu valorisante sans avoir autre chose à faire que la montrer telle qu’elle est, ce qui est déprimant sur le coup.


Ainsi Elisabeth se supporte de moins en moins et supporte donc de moins en moins les 7j qu’elle a encore à passer dans son corps. Elle se laisse aller et patiente rageusement à chaque fois jusqu’au moment où elle pourra incarner son double.

Lorsque la tentation est trop grande et qu’elle grappille du temps dans le corps de Sue les conséquences vont être certes terribles mais vont lui rappeler qu’elle reste encore très belle. C’est ce que j’ai trouvé sympathique dans la conséquence c’est de voir à côté de quoi elle passe parce que l’échelle de la vieillesse et de la mocheté n’est pas terminée non plus donc y a de quoi relativiser et bien se sentir. Qu’elle a toute une vie qu’elle peut se laisser vivre et ça passe notamment par donner l’heure à un homme qu’elle n’aurait jamais calculé alors qu’il l’appréciait physiquement telle qu’elle est (bon après on dirait un fanatique un peu creepy, normal qu’il ne soit lui-même pas séduisant de prime abord).

Ce qui amène vers la scène que j’ai trouvé la plus forte. Le fait qu’Elisabeth se fasse belle pour aller en date. Puis elle croise l’image de son double à plusieurs reprises et perd à chaque fois un peu plus confiance en elle jusqu’à détester son image dans le miroir, se trouver ridicule et moche et décider de ne plus sortir et se renfermer chez elle dans le noir ne voulant pas qu’on la voit comme ça. J'imagine qu'un parallèle est à faire avec le rapport qu'on a avec les réseaux sociaux (même moi qui n'en ai pas je ne pense pas être immunisée).

C’était tellement triste d’assister à cette porte de sortie qui s’était ouverte pour se refermer aussi vite et la voir s’enfoncer dans la détestation de soi alors qu’elle pouvait refaire surface en reprenant confiance en elle.


Et cette détestation de soi se renforce au travers de la règle la plus importante de The Substance « remember you are one ». Au début je trouvais cette phrase surfaite parce qu’il était évident à mes yeux qu'Elisabeth et Sue restaient la même personne, d’autant plus évident qu’on voyait clairement que l’une était « en veille » quand l’autre était en vie. Puis le film amène bien la dissociation qui se crée. Elisabeth (et même le vieux qui l’a mise dans cette galère) oublient. Quand ils sont dans le corps de la « matrice » ils commencent à détester « l’autre » qui a cette vie tellement plus stimulante, pleine d’opportunité et qui a tendance à les vampiriser en dépassant de plus en plus le délai de 7j imparti causant des dommages au corps « matrice » (alors que c’est eux qui font ce choix). Elisabeth la déteste au point de tomber dans des crises d’hyperphagie qui impacteront l’autre.

Et « l’autre » déteste avoir à gâcher son corps en étant en veille pour laisser vivre le corps « matrice » décrépi qui ne fait rien d’intéressant de sa vie, dont chaque jour est un gâchis et qui n’arrive pas à se contrôler pour avoir une vie correcte (alors que ça reste elle qui fait ces choix).


La confrontation des deux avant la fusion s’annonçait palpitante mais j’attendais + de réflexion dessus. In fine le parti-pris a + été une explosion de violence enfouie. Ca en devenait incohérent (+ Elisabeth vieillit + elle a des problèmes moteurs de personnes âgées mais quand il s’agit de courir et traîner un corps tout va bien) mais une fois accepté cette envie scénaristique, let’s go (j'avais déjà accepté l'idée qu'elle puisse construire une pièce secrète toute seule).

C’est grandiloquent, on a hâte de savoir comment ça va se clôturer et le final m’a autant fait penser à Carrie qu’a une anecdote d’une supérieure sur sa belle-mère qui a vomi en spray sur les murs de sa salle à manger. Ça me faisait rire cette vibe de "plus rien à foutre" dans le choix même d'en faire la scène d'apothéose.


J’ai beaucoup aimé la boucle bouclée de l’étoile du walk of fame.


Sinon que dire ? Ca faisait pas peur. Après je suis une proie facile pour les jumpscares, dans la salle je crois que j’étais la seule à sursauter en ayant les mains qui bondissaient devant mes yeux à chaque fois.

J’adore le choix d’utiliser des prothèses. J’adore tous les sons qui accompagnent les actions, la chair, etc.

Je ne me suis pas ennuyée, j’étais intéressée, c’est du « cinéma de genre » appréciable. Le précédent film de Fargeat, Revenge, m’avait déjà intéressée dans son thème sans réellement l’apprécier réellement. Vu que celui-ci est encore mieux je continuerai de suivre ce qu’elle fait.

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le 28 nov. 2024

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