Une réflexion sur la notoriété et sur la beauté et sur les affres que les deux subissent quand les années s'en chargent.

Mais loin de toute froideur cérébrale, Coralie Fargeat prend la problématique aux tripes, et c'est peu de le dire, en dépeignant notre société sans fard, de la beaufitude incroyable et pourtant à peine caricaturale de la gente masculine au diktat de la jeunesse éternelle.

Le film est follement réussi, nourri d'une cinéphilie évidente ; il offre des plans très construits, des images léchées aussi belles que ce qu'elles montrent est parfois repoussant, ainsi que de vraies trouvailles visuelles. La mise en scène et l'utilisation de l'espace notamment dans l'appartement de Lizzie/Sue dénote une vraie maîtrise et participe de l'énergie qui irrigue l'intégralité des 2h20 qu'on ne voit pas passer.

Les clins d'oeil à Kubrick, Lynch, Cronenberg, Hitchcock, Ted Browning viennent ajouter de l'intelligence à un scénario très abouti.

L'interprétation est époustouflante, Demi Moore donne beaucoup et accepte de jouer avec son image sans aucune limite, mais n'oublions pas Dennis Quaid qui campe un producteur dégoulinant de désir et monstrueux de beauferie ...

Les scènes de nourriture sont aussi crues que celles de transformations physiques (de quoi vous dégoutez à vie des crevettes ou de la dinde) mais sont très signifiantes. On bouffe goulument les nourritures terrestres comme on bouffe ses semblables, comme Sue dévore la vie d'Elisabeth ou comme les hommes se gavent de la vision du corps de la femme-objet.

Vers la toute fin du film, justement, le détournement de l'objet fétiche du regard lubrique avec un sein soudain exhibé de façon peu coutumière est vraiment jouissif, on obstrue la vue d'une petite fille qui assiste au spectacle alors que ce qu'elle regardait avant n'était guère plus recommandable, une belle illustration de l'hypocrisie sociale.

Le final part vers un grand guignol assumé aux accents tragiques qui nouent la gorge avec un équilibre subtil qui permet de ne pas basculer dans une ridicule outrance, malgré le final très trash.

Un excellent film : il est impossible de jouer impunément avec le temps qui passe, et le revers du walk of fame n'est pas la map to the stars que l'on pense.




Zebre39
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le 5 déc. 2024

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