Depuis que je suis devenu "un vrai cinéphile" (lol), je déteste prendre un film en cours de route à la télé, c'est un truc que je ne fais jamais.
Et pourtant, je suis tombé l'autre soir sur une rediffusion tardive de "Tout pour être heureux", et je me suis laissé "hypnotiser" durant une grosse dizaine de minutes (qui m'ont mené jusqu'au dénouement), oubliant littéralement de zapper, le temps de 3-4 scènes étonnamment justes, et surtout d'un magnifique générique final : une reprise soul de "Salut les amoureux" de Joe Dassin, soulignant avec une élégance folle la grâce toute simple des paroles de cette chanson, l'une des plus belles de ce chanteur très inégal.
Ni une, ni deux, je me suis décidé à revoir en entier le film de Cyril Gelbat, qui ne m'avait jamais attiré jusque là, en raison notamment de son affiche, mettant l'accent sur les enfants et sur un Manu Payet hilare. L'affiche en question plus le titre choisi constituent un marketing assez mensonger, et maladroit me concernant, puisque j'y avais vu une énième comédie familiale.
En réalité, le deuxième long-métrage de Gelbat est une chronique de moeurs douce-amère, dans laquelle un trentenaire égoïste et immature se sépare de sa femme, et doit s'occuper seul de leur deux fillettes durant quelques semaines.
Un pitch a priori banal, mais transcendé par une justesse de ton et par une tonalité alternativement sarcastique et mélancolique. Le réalisateur-scénariste n'invente rien de follement original, mais ses personnages sont incarnés, ses dialogues sonnent justes, et ses situations apparaissent crédibles.
Si le film fonctionne si bien, c'est bien sûr grâce à une interprétation de premier plan, à commencer par Manu Payet, qui prouve sa capacité à dépasser le registre de la pure comédie.
Autour de ce héros pas forcément sympathique, les divers seconds rôles se montrent à leur avantage : Aure Atika en soeur juive attachiante, Audrey Lamy en épouse déçue, Pascal Demolon en producteur blasé, Vanessa Guide en maîtresse déjantée, sans oublier la chanteuse soul Joe Bel dans son propre rôle ou presque (c'est elle qui interprète le fameux générique).
En signant cette libre adaptation du roman de Xavier des Moulins (intitulé "Un coup à prendre"), Cyril Gelbat nous offre une jolie variation sur la fameuse crise de la quarantaine au masculin, une chronique de moeurs tantôt drolatique, tantôt émouvante, avec en prime un dénouement plutôt audacieux et inattendu, à rebours des clichés habituels du genre.