Rémi Bezançon, un réalisateur qui propose des films avec des sujets intéressants. Ce qui a donné lieu à des réussites comme Le Premier Jour du reste de ta vie et comme... Le Premier Jour du reste de ta vie. Pour le reste, on est soit dans le moyen, avec souvent un traitement qui n'est pas à la hauteur du potentiel de base, soit dans le mauvais (je retire juste Nos futurs que je n'ai pas encore visionné, donc je n'en dis rien !).
Un coup de maître, remake d'un long-métrage argentin (que je n'ai pas encore visionné non plus, donc… !), propose un sujet intéressant, mais n'est pas à la hauteur du potentiel de base.
Sa satire du milieu de l'art moderne (à savoir que c'est un milieu qui sert plus des objectifs capitalistes qu'artistiques !) se résume à quelques pauvres figures caricaturales vite expédiées. L'un des deux protagonistes est un peintre voulant à tout prix et en toutes circonstances être intègre, antisystème et libre. Ceci aboutit à une morale facile (le capitalisme, c'est méchant et il ne faut pas servir le capitalisme, car c'est méchant !) et, dans le même temps, à une grosse invraisemblance (je vais revenir plus loin sur ce dernier point !).
S'il y a un point positif à retenir de l'ensemble, ce sont les deux personnages principaux et leur amitié. Leurs interactions fonctionnent parce que l'on comprend très vite qu'ils sont prêts à tout l'un pour l'autre, parce qu'ils vont souvent à l'encontre de leurs intérêts pour jamais se trahir. C'est une forme de sincérité dans un environnement vicié. Et je trouve cet aspect bien creusé par le récit. Et il est rendu encore plus crédible par le talent et l'alchimie qui se dégagent entre Vincent Macaigne et Bouli Lanners.
[Bon, maintenant, je vais divulgâcher à mort. Étant donné que je ne veux pas, à travers une utilisation de la balise spoiler, qu'une grosse partie de la suite de ma critique ressemble visuellement à un chef-d'œuvre d'art moderne, je ne dissimulerai rien. Sans trop vous en balancer et pour vous la faire courte, je reproche globalement, outre le superficiel du côté satirique, un lot bien gênant d'invraisemblances. Continuez votre lecture de cette critique que si vous avez déjà regardé le film ou si vous n'en avez absolument rien à foutre de celui-ci.]
Alors, je n'ai pas compris le pourquoi d'avoir recours à un flashback pour révéler un truc ultra-prévisible, à savoir que l'artiste ne s'est pas suicidé. Euh, Rémi, tu prends le spectateur pour un débile pour croire un seul instant qu'il goberait cela, pour croire que l'effet de surprise fonctionnerait ? C'est évident que son meilleur pote ne le laisserait jamais faire cela. C'est du suspense à deux balles.
A propos de cela, déjà, il faut plus que corrompre un employé des pompes funèbres pour réussir le plan de convaincre tout le monde qu'une personne s'est suicidée. Il faut arroser aussi le médecin qui constate le décès, la police qui doit être avertie, les légistes qui sont supposés faire une autopsie (car ce type de décès passe généralement par une autopsie !). Une fausse disparition n'aurait pas été plus crédible qu'un soi-disant suicide avec faux enterrement ?
En ce qui concerne le faux enterrement justement, vu qu'il s'agit d'un d'une célébrité, pourquoi il n'y a pas la présence de médias, même au loin ? Et pour le "mort", le fait qu'il soit à quelques mètres du lieu de la cérémonie le ferait immédiatement griller d'une manière ou d'une autre.
Autrement, l'intrigue se déroule en France ou en Belgique. Et bordel de merde, vous croyez que dans ces pays étouffant sous le laxisme, on condamnerait à la moindre peine de prison ferme deux personnes célèbres, croulant sous la thune (au moment de l'histoire lors duquel ça se déroule !) ? Non, cela aurait été crédible de les faire condamner à la place à un sursis à la con et à une amende, énorme pour le commun des mortels, qui est la crasse de leurs poches pour eux.
Et pour la morale facile, évoquée plus haut, à la fin, les toiles de l'artiste, très cotées sur le marché de l'art, sont vendues aux enchères pour une association. Euh, vous pensez sérieusement que les riches les laisseraient acheter par des gens normaux pour presque que dalle (ben ouais, ça baisserait dangereusement la valeur de leurs investissements s'ils sont en possession de tableaux du Monsieur !) et ne s'arrangeraient pas pour les obtenir à prix d'or tout en se donnant l'image, gratuite elle, d'êtres charitables ? Tiens, si la vraisemblance avait été respectée, la satire en serait sortie renforcée.
Bref, heureusement qu'il y a les deux protagonistes et les comédiens les incarnant pour faire remonter (un peu, mais pas suffisamment !) la valeur de ce Coup de maître qui n'en est pas un du tout.