Lorsque que j'ai découvert Asghar Farhadi il y a une petite dizaine d'années, j'ai été immédiatement séduit par son cinéma social naturaliste, capable d'offrir à la réflexion la plus austère une dimension ludique et divertissante (suspense, rebondissements...).
Néanmoins, cette approche récurrente trouve ses limites dans "Un héros", où le canevas narratif finit par apparaître lourd, systématique, et en fin de compte artificiel.
Les nombreux rebonds du récit se révèlent (pour certains) attendus voire convenus, et l'ensemble apparaît un peu mécanique, d'autant que Farhadi nous a habitué à ce type de narration.
L'autre reproche concerne un recours excessif au pathos, à l'image de l'enfant souffrant de bégaiement, et de son discours final pathétique face à la caméra du chef-adjoint de la prison. De même, on pourra trouver que le sort s'acharne un peu trop contre ce pauvre héros, qui semble condamné d'avance, enfermé dans son rôle de victime.
Malgré ces défauts gênants, "Ghahreman" (le titre en VO) décrit avec acuité la société iranienne contemporaine : Farhadi y met l'accent sur le rôle des moyens de communication "modernes" (réseaux sociaux, médias...) dans cette société archaïque.
On découvre ainsi le fonctionnement de certaines institutions locales, telles qu'une prison, un quotidien de presse ou une association caritative.
La dénonciation n'est pas ostentatoire, la critique plutôt discrète, mais d'autant plus implacable qu'on sent une volonté de modération et de justesse.
En conclusion, s'il figure sans doute parmi les moins réussis de son auteur, "Un héros" reste un film intéressant, affaibli par sa mécanique narrative trop bien huilée (et par quelques longueurs), mais sublimé in extremis par une ultime scène aussi brillante que magnifique.