Alors, pour commencer, je tiens à souligner que c'est tant mieux que de nombreuses personnes, ayant un handicapé parmi leurs proches ou ayant une profession en lien avec des handicapés, ont éprouvé du plaisir à regarder ce film et ont été touchés par la justesse qui s'en dégage. Tant mieux aussi que ce soit le cas parmi les principaux concernés. Tant mieux et tant mieux.
Et Artus ne s'étant certainement pas dit que son premier long-métrage, en tant que réalisateur-scénariste, allait connaître un gros carton surprise, semblant débarquer de nulle part, qui plus est avec un thème peu attrayant, a priori, pour séduire en masse les Français moyens, je ne doute absolument pas qu'il l'ait fait par sincérité et non dans l'expectative d'un beau paquet de thune.
Bon, je n'insiste pas longuement sur l'aspect technique avec sa photo, basique, parfois un peu trop suréclairée, ses choix de cadrage et son montage purement fonctionnels. Cela ne se distingue pas du tout-venant de la mise en scène de la très grande majorité des comédies françaises de notre époque, sans la moindre ambition visuelle.
Dans l'écriture, malheureusement, il y a quelques gros manques dommageables, parce que ce qui aurait dû constituer des colonnes vertébrales importantes d'ensemble est trop négligé (pour que la dynamique entre les personnages ne paraisse pas sortir trop abruptement, quand ça arrange le scénario, au lieu d'être mise logiquement en exergue graduellement, au fur et à mesure que l'on avance dans le film !).
Je pense notamment aux relations entre le père et le fils (respectivement joués par Clovis Cornillac et Artus !) qui sont quasi complètement foutues de côté, passé l'introduction, pour ne revenir que lors du dernier quart d'heure. Même type de problème pour le changement d'attitude, en ce qui concerne, là aussi, le personnage cynique de Cornillac, son humanisation, à l'égard du groupe dans lequel il est entré un peu malgré lui.
C'est regrettable, car cela aurait pu apporter un supplément de profondeur ainsi que des fils conducteurs solides qui auraient évité une impression de décousu, sans que tout ceci empiète sur le point le plus essentiel du film.
Et ce dernier est évidemment les handicapés. Big up à Artus d'avoir incorporé au récit les particularités de chacun des acteurs de cette catégorie, pour qu'ils puissent être eux-mêmes, pour qu'ils puissent prendre leur pied sur le tournage (on le ressent, en tant que spectateur, qu'ils l'ont pris et j'en suis heureux !).
En fait, le meilleur (et de très loin !) de l'œuvre, ce sont celles et ceux qui offrent ce p'tit truc en plus du titre. On s'amuse avec (pas "de" !) ces derniers. Pour la raison qu'ils sont nombreux, tous ne sont pas pleinement exploités. Sur une trop courte heure et demie, ce n'est pas possible. Reste que presque toutes les bonnes idées du scénario les concernent directement. Comme la savoureuse ironie quand ils sont les seuls à deviner que le personnage d'Artus se fait passer pour ce qu'il n'est pas. Comme le fait qu'il y ait le début d'une romance entre deux d'entre eux. Ou, encore, comme le fait que le véritable Sylvain (celui qui s'est fait piquer sa place et son identité par le protagoniste !) intègre, par hasard et sans aucune difficulté, un groupe de jeunes fêtards branchés et s'éclate comme jamais. L'air de rien, les messages qui transparaissent de ces sous-intrigues sont beaux.
Autrement, c'est clairement un feel-good movie qui s'assume. Les rares antagonismes viennent généralement lors de leurs excursions en dehors de leur refuge, sans entamer l'optimisme voulu (ce qui est super... un peu de lumière dans notre monde obscurci n'est jamais en trop !). Le tout est assez prévisible, avec quelques clichés narratifs trop éculés et lourds du genre (l'exemple le plus probant, c'est l'évitable et récurrent coup d'éclat sur la fin, ici avec une scène se déroulant dans un tribunal !). Pour me répéter, il y a de la maladresse (de la paresse ?) dans la manière dont est rédigé le scénario. Heureusement qu'il y a celles et ceux qui ont ce p'tit truc en plus.