En regardant dans le rétroviseur, je me rends compte que le biopic musical est un genre que j’ai à la bonne. Même quand c’est raté, j’y trouve toujours un petit truc pour sauver l’œuvre et noter au-dessus de la moyenne. Et quand j’aime bien : j’adore !
Un parfait inconnu fait partie des biopics que j’adore. Déjà sur le papier, le projet avait tout pour me plaire : le film est réalisé par James Mangold, l’un de mes réalisateurs américains préférés et pour qui j’ai vu toute la filmo (j’ai un petit faible pour le boudé 3h10 pour Yuma, pour Identity et Walk the line). Mangold est l’un de ceux qui a réussi à réinventer le film de super-héros (je parle de Logan, pas Wolverine hein). C’est un excellent technicien, aux mises en scènes souvent classiques mais toujours très abouties.
Le casting du film est en or : même si Timothée Chalamet est souvent décrié du grand public, je trouve qu’il reste l’un des acteurs les plus talentueux de sa génération. Un parfait inconnu ne fait pas exception à la règle : Chalamet a réalisé un gros travail pour s’approprier la façon de se tenir et de parler de Bob Dylan. D’autant que comme Monica Barbaro qui interprète Joan Baez, ou Edward Norton qui incarne Pete Seeger, Il a lui-même interprété les chansons de Dylan.
Elle Fanning est quant à elle l’une de mes actrices préférées. Même si son rôle de Sylvie Russo tend à s’effacer dans la deuxième partie du film, l’actrice de The Neon Demon de Refn, des Proies de Sofia Coppola ou d’Un jour de pluie à New York de Woody Allen est plus que convaincante dans la peau de la petite amie tiraillée par les écarts sentimentaux de Bob.
Je ne suis pas un fin connaisseur des chansons de Bob Dylan. J’aime bien la Folk, les chansons à texte, et celles de l’artiste me parlent – elles sont d’ailleurs heureusement sous-titrées dans le film. Dylan est connu pour être l’un des auteurs-compositeurs-poètes les plus talentueux de sa génération. Il est d’ailleurs le seul chanteur a avoir reçu le Prix Nobel de Littérature, en octobre 2016 (face notamment à son ami Léonard Cohen, l’autre grand génie de la Folk), « pour avoir créé de nouvelles expressions poétiques dans la grande tradition de la chanson américaine ».
Ce qui m’a plu dans Un parfait inconnu, c’est que le film échappe au carcan classique du biopic, la fameuse trajectoire rise & fall. Nous avons bien ici le « rise » - les débuts du petit jeune qui galère, fraichement débarquée à New York et inconnu au bataillon, avant d’être repéré et de connaître la célébrité - mais ici pas de chute – drogues, alcool, et tous les poncifs du genre.
Ce mouvement crescendo, jusqu’à l’inévitable concert final, place le film dans la catégorie des feel good movies. On ressort de la séance galvanisé et heureux, des mélodies et chansons plein la tête.
Pour construire son scénario, James Mangold s’est appuyé sur l’ouvrage Dylan Goes Electric! de Elijah Wald paru il y a une dizaine d’année. Derrière le portrait de Dylan, le cinéaste raconte également une période très spéciale de l’histoire américaine. Au plus fort de la Guerre Froide et de la crise des missiles de Cuba, la société outre-Atlantique connaît une nette mutation culturelle. Dylan apporte sa pierre à cette petite révolution en introduisant dans la chanson Folk guitare électrique et accompagnement de basse et de batterie. Un changement de direction qui n’est pas vu du bon œil par tous ses fans.
Du haut de ses 2h20, Un parfait inconnu tient son spectateur en haleine. Le film n’est pas avare en moments musicaux et chansons, qu’elles soient de Dylan, de Pete Seeger, de Joan Baez ou de Johnny Cash (pour la petite histoire, Mangold a également réalisé en 2006 Walk the Line, un biopic sur Johnny Cash, interprété à l’époque par Joaquin Phoenix). Le choix de resserrer l’histoire sur 4 ans de la vie de l’artiste s’avère judicieux. Rien d’étonnant à retrouver le film très haut dans les nominations aux Oscars – pas moins de 8 nominations, dont meilleur film, meilleur réalisateur et meilleur acteur. Gageons que le film remportera au moins l’une de ces statuettes !