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Entre critique sociale et thriller inabouti

Pour son premier long-métrage en tant que réalisatrice, Anna Kendrick s'attaque à une histoire inspirée de faits réels; celle du tueur en série Rodney Alcala, apparu sur le plateau de 𝑇ℎ𝑒 𝐷𝑎𝑡𝑖𝑛𝑔 𝐺𝑎𝑚𝑒 en 1978. Un tel sujet aurait pu donner lieu à un thriller captivant sur la banalisation de la violence envers les femmes dans les médias et la société. Kendrick, qui excelle par ailleurs devant la caméra en incarnant Sheryl, une actrice démontrant une réelle curiosité pour la question du regard. Cependant, cette exploration est entravée par un manque de rythme et de direction claire, transformant le film en un hybride batard entre thriller social, drame psychologique et portrait sadique.


La réalisation de Kendrick nous offre une mise en scène efficace mais manquant de subtilité, soutenue par une direction de la photographie soignée. Elle adopte une approche délibérément distanciée des actes de violence, ne montrant que les signes avant-coureurs et les tensions sous-jacentes, sans verser dans le sensationnalisme. Toutefois, cette retenue répétée devient plus un tic de montage qu'une véritable intention narrative. Daniel Zovatto offre également une performance efficace dans le rôle d'Alcala, un homme dont le charme masque une cruauté froide. Les interactions entre les personnages, notamment le duel verbal entre Sheryl et Alcala lors de leur rendez-vous, sont bien construites et révèlent l'angoisse latente de ces rencontres. Mais au-delà de ces instants précis, le film peine à trouver un équilibre entre la dénonciation du sexisme systémique et l'exploration du portrait d'un tueur.


C'est précisément ce manque de direction qui nuit à l'impact de 𝑊𝑜𝑚𝑎𝑛 𝑜𝑓 𝑡ℎ𝑒 𝐻𝑜𝑢𝑟. Le montage irrégulier échoue à maintenir la tension, s'étirant sur des scènes qui auraient gagné à être plus percutantes ou condensées. Malgré une durée modeste d'une heure et demie, l'impression de longueur persiste, rendant la narration flottante. Kendrick semble hésiter entre un film contemplatif et un thriller plus nerveux, créant une hybridation manquant de cohérence et de profondeur. Si l'intention de questionner la manière dont la société perçoit et traite les violences faites aux femmes est louable, le film se contente trop souvent de souligner ses intentions sans réellement les développer.


L'aboutissement du film laisse également à désirer lorsque, à la fin, des cartons texte viennent expliquer la suite et le contexte, révélant une histoire bien plus intéressante que celle portée à l'écran. Cette révélation tardive souligne les faiblesses narratives du long-métrage. 𝑊𝑜𝑚𝑎𝑛 𝑜𝑓 𝑡ℎ𝑒 𝐻𝑜𝑢𝑟 apparaît ainsi comme un premier film qui ne sait pas véritablement ce qu'il veut être, se retenant trop dans une mise en scène faussement subtile. Malgré une réalisation techniquement maîtrisée et des acteurs talentueux, le film ne parvient pas à dépasser sa posture critique, offrant une œuvre prometteuse mais inaboutie.

dosvel
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