Un très bon souvenir de mon adolescence, qui tient toujours bien la route des années plus tard, même si mon regard sur le film a changé : à l'époque c'était la totale rupture de ton et le basculement vers le fantastique à mi-métrage qui m'avait impressionné, alors qu'aujourd'hui c'est à l'inverse la première moitié que j'ai adoré, avant de déplorer l'aspect Z de la seconde.
En effet, les 40 premières minutes de "From Dusk til Dawn" sont une réussite totale, grâce notamment à un trio de personnages principaux hyper complémentaires, à l'écriture soignée - le scénario est signé Tarantino, ce qui se vérifie à chaque instant, le lascar étant peut-être dans la période la plus créative de sa carrière dans ce domaine…
Dans le rôle du héros Seth Gekko, on découvre un George Clooney de gala, à la fois drôle et bad ass, à l'époque au sommet de son charisme, juste après avoir été le gentil docteur latino dans "Urgences", et avant de devenir bientôt un acteur comique chez les Coen (ainsi que Mister Nespresso).
Son duo avec son frangin Harvey (Quentin Tarantino himself), dangereux sociopathe débilisant et obsédé sexuel notoire, fait des étincelles.
Enfin, le grand Harvey Keitel se révèle le pendant idéal des deux mabouls, père de famille et pasteur dont la foi s'est dissipée lors du décès de son épouse.
Débutant comme un film noir au ton sarcastique, "From Dusk til Dawn" bascule donc ensuite vers la comédie horrifique, mais on appréciera sa tonalité plutôt sombre en dépit de l'aspect délirant et parodique : les frangins braqueurs laissent de vrais cadavres sur leur passage (le public s'identifie donc à des tueurs, même si pour Clooney c'est à son corps défendant), certains personnages principaux meurent pour de bon, et même la dernière scène nous épargne un pseudo rapprochement entre les deux survivants.
Un divertissement assumé qui s'éloigne des canons hollywoodiens, ça fait toujours plaisir.
Comme je le signalais plus tôt, la seconde partie du film manque de tenue, c'est un gros bordel jubilatoire aux allures de série Z, d'autant que les effets spéciaux ont évidemment pris un gros coup de vieux. Même le travail sur le maquillage apparaît inégal, surtout lorsqu'on repense à certains films des années 80 ("Alien", "The Fly"...).
C'est toutefois l'occasion de souligner l'originalité réjouissante du casting, puisqu'outre Salma Hayek et son numéro devenu culte, on croise Danny Trejo, Tom Savini, Fred Williamson ou encore Cheech Marin, hilarant en rabatteur friand de pussies…
"Une nuit en enfer" reste donc un film marquant pour tous ceux qui l'on vu dans leurs jeunes années, représentant le sommet de la carrière du mexicain Robert Rodriguez, réalisateur talentueux mais désinvolte, qui signera encore le très bon "The Faculty" deux ans plus tard, avant de se perdre dans des productions souvent bas de gamme - même si ses derniers travaux ("Machete", "Alita") semblent lui redonner une certaine aura.