Amis dépressifs, passez votre chemin ! Adaptation du roman de Guy de Maupassant (que je n’ai pas lu), « Une Vie » est la chronique de Jeanne, bourgeoise du 19ème siècle qui va voir une vie déprimante sous tous rapports… A peine sortie du couvent, elle épouse un vicomte endetté qu’elle trouve mignon. Mais ce mariage s’avèrera rapidement sinistre, et causera petit à petit la faillite financière et émotionnelle de sa famille.
Stéphane Brizé fait le choix étonnant de filmer en format presque carré, et souvent par des plans serrés. J’ignore si c’est lié à une contrainte budgétaire pour s’éviter une ample reconstitution d’époque. Toujours est-il que cela fonctionne bien ici. On a l’impression que notre héroïne ne respire jamais, enfermée dans un quotidien qui l’écrase et qu’elle ne sait pas gérer.
La narration est elle-aussi un peu perturbante, enchaînant les ellipses. Plusieurs faits majeurs sont passés sous silence, pour n’être visibles que par des marques physiques ou psychologiques. Le résultat est parfois un peu longuet, mais là encore, cela renforce le sentiment d’isolement et de déprime de notre protagoniste.
Et puis si « Une Vie » se focalise sur Jeanne, c’est aussi un portrait peu flatteur de son époque. Les jeunes femmes sont envoyées au couvent mais n’y apprennent rien de la vie (comment gérer un mariage, une fortune, des enfants, communiquer avec ses parents…). Le clergé peut jouer le rôle de médiateur/psychologue mais ont tendance à culpabiliser tout le monde.
Avec en prime de bons acteurs (dont Judith Chemla qui porte bien le chagrin qui s’accumule), « Une Vie » est donc un film d’époque bien pensé et pertinent.