J'ai toujours le cœur sensible et un brin de sympathie pour les films de science-fiction européens, qui malgré des budgets limités offrent une vision différente du futur, loin des blockbusters américains. Vesper est parfois maladroit mais il arrive à développer un environnement cohérent, sans tomber dans la facilité ou les scènes tape-à-l'œil. Son univers post-apocalyptique empreint de pourriture, où on ressent très clairement les influences de Nausicaa de Miyazaki ou du Blade Runner 2049 de Villeneuve, est vraiment le point fort de la série. Il est réussi visuellement, généreux et consistant dans son ensemble, y compris sur le reste des décors, les costumes et la représentation des personnages complexes, jusqu'à l'ambiance sonore. Le budget des effets spéciaux a été majoritairement investi dans la consolidation de cet univers et ça fait plaisir.
Le film est par ailleurs porté par des acteurs solides et traite de questions environnementales très actuelles, comme l'appauvrissement des ressources ou l'empoisonnement de la terre. En revanche le film souffre d'un vrai problème de positionnement, oscillant maladroitement entre des propos et des scènes très adultes — que ce soit dans le fond comme dans la forme — et d'autres souvent trop enfantines. Ce déséquilibre se retrouve dans tous les aspects de l'écriture, et Vesper en est le parfait exemple : Elle a grandi dans un monde hostile et violent, où elle a su faire preuve d'adaptation et d'intelligence, et d'une maturité précoce. Mais par moments elle ressemble bien trop à une enfant de notre époque, et ce revirement de caractère insouciant fonctionne mal. Ainsi pendant tout le film on va ressentir une forme de gêne et de déséquilibre, le film sachant jamais trop comment s'adresser à nous.
Et c'est un peu dommage car sinon il développe de belles idées. La réalisation est inventive et le film va vraiment loin dans la poursuite de son esthétique putride et semi organique. Au-delà des questions environnementales, les réalisateurs traitent aussi de la violence institutionnelle, de la recherche scientifique et ses dérives, de la guerre et de l'abandon des populations moins fortunées.
Vesper reste donc un film inventif, bien construit, très bien joué et bien réalisé et qui nous offre une autre manière d'appréhender la science-fiction, plus noire et plus proche de la littérature de genre. Si on dépasse ses imperfections le film s’en tire très honorablement.