Adam McKay, le réalisateur de The Big Short, est de retour et ne peut toujours pas contenir sa colère envers les institutions brisées de l'Amérique. Il nous raconte ici la vie de l'ancien vice-président des States, Dick Cheney, un politicien réservé mais influent qui métamorphosa un bureau ricain à responsabilités limitées en une machine de guerre surpuissante qui changea la face de leur politique domestique et étrangère, impactant l'économie, les Droits de l'Homme et donc le monde entier.
Christian Bale - ayant une nouvelle fois pris 20kg pour incarner un personnage - joue ledit Cheney qui, au départ, est un jeune alcolo gentiment pressé par son épouse Lynne (Amy Adams) de se reprendre en main et d'entamer une carrière en politique. Il met alors le cap sur Washington D.C. où il devient stagiaire pour Donald Rumsfeld (Steve Carrell), un membre du Congrès républicain dont les ricanements masquent à peine la perversité dans le domaine.
Dick Cheney gravit les échelons de la Maison Blanche sur plusieurs années, y gagne en expérience et en notoriété jusqu'à ce que le vent tourne: sa santé défaillit. Il décide alors de se retirer dans sa propriété en Virginie et de prospérer dans le secteur privé. FIN... oui mais, et si un certain Georges W. Bush lui donnait un coup de fil pour lui proposer le poste de vice-président des Etats-Unis?
A l'instar d'un certain Richard III (prenons au hasard l'adaptation avec Ian McKellen), Vice décompose avec une acerbe ferveur l'influence que peut avoir une seule et même figure politique, même controversée.
Et tout comme l'oeuvre de Shakespeare, le film ne cache jamais ses intentions; Vice ne sera pas un film que le public regardera pour sympathiser avec Cheney mais plutôt pour comprendre pourquoi tant de gens le détestent.
De ce fait, Christian Bale , Amy Adams et le reste du casting ont pour délicate mission de conférer une certaine humanité à des personnages qui ne montrent que très peu d'amabilité.
A ce petit jeu, Adams s'en sort très bien. Sorte de Lady MacBeth (Shakespeare, quand tu nous tiens), elle manipule son monde du mieux qu'elle peut et remet en évidence le fait que "derrière tout grand homme se cache une femme", aussi vicié(e) soit-il(-elle).
Mais lorsqu'elle nous permet d'atteindre le coeur de Dick Cheney, le mal est déjà fait, car Bale passe la plus grande partie du film à camper un personnage qui a vendu son âme au diable et qui fut si grassement payé pour le faire qu'une remise en question semble inenvisagée.
Et de quelle incroyable manière joue-t-il ce personnage!
Il rend cet homme totalement crédible alors que s'il s'agissait d'une simple fiction, nous ne pourrions décemment croire en son existence.
Notre véritable Oscar du meilleur acteur 2019, c'était lui.
Bref, en brisant à maintes reprises le 4ème mur (comme il le faisait déjà dans son moins accessible The Big Short) et en dressant subtilement le parallèle avec la situation actuelle, Adam McKay nous offre un délicieux commentaire politique sans le côté grave et rébarbatif lié au genre.
Considérer l'une des figures publiques les plus insidieuses et dangereuses de ces 50 dernières années avec un humour aussi caustique n'a pas dû réjouir les instances républicaines mais quoi qu'il arrive, à la fin le Vice vous laissera sans voix.
Conseillé: A ceux qui pensent que tous les films politiques sont soporifiques.
Déconseillé: aux fervents défenseurs des institutions américaines.
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