Vice-versa 2
6.8
Vice-versa 2

Long-métrage d'animation de Kelsey Mann (2024)

* Critique originale disponible sur Duotaku no Sora *

Je suis Anxiété. Je fais partie des nouvelles émotions de Riley, et les autres et moi, on est super excités d'être ici !

Riley a désormais 13 ans, elle continue de mener une vie paisible avec sa famille, ses amies et sa passion pour le hockey. Un beau jour, suite à un match, une professionnelle la remarque et lui propose de faire un stage pour postuler dans l'équipe des Fire Hawks au lycée.

Dans le Quartier Cérébral où vivent les personnifications de ses émotions, Joie, Tristesse, Dégoût, Peur et Colère veillent sur elle quand tout à coup, de nouvelles émotions apparaissent !


Adolescence et abondance d'émotions


Suite à plusieurs films originaux, Pixar Animation Studios se lance à son tour dans les suites de films ayant fonctionné, sans doute pour chercher à plaire à Disney qui depuis quelques années cherche à reléguer Pixar au fond du placard. En effet, suite au COVID, la plupart des films de la firme se seront vus purement et simplement privés d'une sortie dans les grandes salles. Et ce n'est pas la sortie d'Élémentaire ou du spin-off Buzz L'Éclair qui auront conquis les salles et rempli le box-office. Ainsi comme Disney l'a déjà bien compris, il faut faire des suites aux franchises qui fonctionnent ! Ce n'est donc pas pour rien qu'a déjà été annoncé aux côtés de la suite de La Reine des Neiges, une nouvelle suite à Toy Story. Et bien que Pixar a cherché à rassurer les fans en assurant une alternance entre films originaux et suites aux franchises à succès, on se doute bien que Disney pourra chercher à planter les films originaux avec un marketing parfois inexistant comme ce fut le cas pour Avalonia, ou Élémentaire encore, tout le contraire donc de Vice-Versa 2 qui aura eu un marketing omniprésent !


Ainsi cette suite se concentre donc sur Riley qui entre en phase d'adolescence avec l'apparition de nouvelles émotions. Un synopsis vague mais qui a le mérite d'attirer l'attention. Il faut dire que le traitement des débuts de l'adolescence et de la puberté avait déjà bien été retranscrit dans Alerte Rouge sorti uniquement sur Disney+ en 2022 avant de se voir décliné en sortie physique. Concernant Vice-Versa, le premier film avait mis la barre très haute puisqu'au-delà de son concept inventif, il parvenait à conserver une double lecture avec de nombreux concepts psychologiques tout en restant poétique et imaginatif et en gardant le charme des productions Pixar. Et si ce deuxième volet s'avère déjà être un succès au vu des nombreux dollars engrangés grâce aux avant-premières — confortant Disney et Pixar dans le choix de faire des suites —, il est temps de se pencher sur cette suite attendue pour voir si il s'agit juste de capitaliser un max sur la franchise ou si le film a une réelle intention à nous raconter quelque chose de nouveau.


Vice-Versa 2 est donc une suite du premier film du même nom. Exit donc Pete DOCTER, réalisateur du premier film, au profit de Kelsey MANN qui a fait ses armes sur Le Voyage d'Arlo.

On suit toujours Riley qui est désormais âgée de 13 ans et s'est bien intégrée dans sa nouvelle école et qui reste toujours aussi passionnée de hockey. Ses émotions, Joie, Colère, Dégoût, Tristesse et Peur quand à elles, veillent toujours sur elle dans le Quartier Cérébral. C'est alors que suite à un de ses matchs de hockey, Riley et ses deux meilleures amies se voient proposer de partir en stage de 3 jours par une professionnelle du milieu. Mais alors que la jeune fille entre en début d'adolescence, de nouvelles émotions arrivent dans son esprit et vont profondément la changer au cours de ce stage. C'est là que suite à une divergence d'opinion, Joie, Colère, Dégoût, Peur et Tristesse se voient relégués au fond de l'esprit de Riley. Ainsi, ils vont devoir récupérer une composante essentielle qui fait de la jeune fille ce qu'elle est.


Cette suite propose un scénario assez classique qui peut faire redite avec le premier, à savoir des émotions envoyées dans l'esprit de Riley et d'autres qui cherchent à assurer la protection de la jeune fille. Le scénario s'articulera à nouveau autour de 3 aspects. Le premier sera la vie de Riley avec ses changements de comportements parfois extrêmes allant d'un ton à un autre. Le second s'attardera sur les nouvelles émotions ayant pris la place au tableau de commande. Et le troisième se focalisera sur les émotions que l'on connaissait déjà et qui vont – à nouveau – parcourir l'esprit de Riley jusqu'aux tréfonds de sa mémoire pour récupérer un artefact. En soi rien d'inédit donc, cependant le film parvient à accrocher grâce à ses thématiques à double lecture où certaines scènes pourront faire rire les plus jeunes tandis que les plus vieux se retrouveront de manière plus nostalgique. Tout le film est donc un build-up autour de Riley qui va finir par prendre de mauvaises décisions suite à l'anxiété qui la ronge de savoir si elle sera prise ou non dans l'équipe de hockey qu'elle adule.


Et c'est cela qui sera le point d'orgue du film, les deux idéologies qui s'affrontent entre les nouvelles et les anciennes émotions. Pour Joie, c'est le moment présent qui importe et ce, même s'il peut y avoir des conséquences derrière. Pour Anxiété, les décisions à prendre le jour même auront des conséquences sur la vie future de Riley, il est donc nécessaire de faire les bons choix et d'agir avec prudence. Deux idéologies opposées qui viendront impacter les 3 jours de stage de la jeune fille qui aura de plus en plus d'angoisses après certaines paroles qui peuvent sembler anodines mais qui la blesseront beaucoup plus qu'on ne pourrait le croire à première vue. Ainsi le scénario est classique mais encore une fois efficace dans la délivrance de ses messages où bon nombre de téléspectateurs pourront se reconnaître.


De nombreuses émotions sous-développées


Il est d'ailleurs temps de présenter toutes ces émotions qui régissent l'esprit de Riley.


On retrouve donc Joie, optimiste et qui se soucie profondément du bien-être de Riley, assez insouciante cependant et qui ne se rend pas toujours compte des conséquences que peuvent impliquer ses actes. Cependant le personnage demeure intéressant au fil de l'aventure puisqu'on y découvre que même un personnage semblant toujours de bonne humeur peut elle aussi craquer et que parfois un visage trop joyeux ne peut être qu'une façade. À ses côtés se trouve donc Tristesse qui est bien plus intégrée au groupe que dans le premier film. Elle cherchera elle aussi à aider Riley lorsqu'elle en aura le plus besoin. Dégoût sera égale à elle-même, jugeant les crush de la jeune fille, tout comme Peur. Colère quant à lui, saura se montrer d'une aide précieuse pour Joie en trouvant les bons mots.


Mais on retrouvera désormais de nouvelles émotions à commencer par Anxiété qui comme son nom l'indique est très craintive. Une boule d'angoisse qui malgré ses craintes se soucie réellement du bien-être de Riley bien que cela puisse la conduire à prendre de mauvaises décisions sous l'impulsion du stress, s'imaginant sans cesse des scénarios négatifs. On a également Envie, une petite fascinée par tout ce qu'elle voit. Ennui qui possèdera une commande pour diriger l'esprit de Riley car il n'a pas la motivation pour se lever de sa banquette, et enfin Embarras qui comme son nom l'indique est extrêmement introverti.


Concernant les personnages humains, on retrouvera donc Riley qui entre dans sa phase adolescente et qui cherche à intégrer les Fire Hawks. Ses meilleures amies Bree et Grace qui vont petit à petit être délaissées par leur amie qui pour sa part cherchera à s'inspirer de Val, une des meilleures joueuses de l'équipe et qui sera tel un mentor pour la jeune fille.


Ainsi si les humains sont plus quelconques, les personnifications d'émotions sont quant à elles bien plus intéressantes. Des émotions aux designs variés donc mais qui malheureusement ont du mal à fonctionner en tant que groupe. En effet, si Joie et Tristesse seront bien exploitées tout comme Envie et Anxiété, ce sera beaucoup moins le cas pour la moitié des autres. En effet, Ennui est très vite mis de côté et ne sert pratiquement à rien, comme Embarras qui préfère regarder la situation sans oser intervenir. De plus, les émotions communiqueront très peu entre elle, il y a un gros manque de développement de relation entre les deux groupes, si bien qu'on en vient au principal souci du film, à savoir son rythme.


Une réalisation soignée au profit d'un rythme effréné


Le rythme sera le principal souci du film à mes yeux, ayant bien du mal à le gérer. En effet, l'introduction est extrêmement rapide avec l'élément déclencheur – début de la puberté – entraînant l'apparition de nouvelles émotions, et très vite Joie, Colère, Dégoût, Peur et Tristesse sont mis de côté laissant aux nouvelles émotions la main mise sur le Quartier Cérébral. Et c'est dommage car selon moi il aurait été bien plus intéressant de développer un début de relation entre les nouvelles et anciennes émotions avec un simili de divergences d'opinions. Ici, c'est beaucoup trop rapide et le film va souffrir des trois histoires parallèles qu'il s'impose. La partie centrée sur Riley focalisée sur son stage est intéressante puisque cela justifie son surplus d'émotions puisqu'elle aura l'impression de jouer son avenir. De même pour la partie focalisée sur les nouvelles émotions, intéressantes elles aussi mais qui seront grandement sauvée par le personnage d’Anxiété qui porte le film à bout de bras au vu des rôles mineurs des autres émotions. Enfin la partie centrée sur Joie est pour sa part mal narrée, avec plusieurs séquences qui n'apportent pas énormément à l'histoire et où l'on retrouvera également des lieux déjà parcourus dans le premier film...


Malgré tout, tout n'est pas à jeter, le film demeure extrêmement inventif et réussit toujours à justifier des concepts psychologiques à travers son animation comme le surplus de pensées qui nous empêche de dormir ou bien encore ces passions que l'on préfère renier lorsque l'on désire s'intégrer à un groupe. Et bien sûr le plus important, à savoir l'estime de soi, qui en prend rapidement un coup lorsque l'on est soumis à trop de pression ou que l'on est dénigré, un point abordé avec brio durant tout le long-métrage. En soit de multiples idées mais dont certaines ne servent qu'à une scène avant de passer à une autre dès la scène suivante sans prendre en compte ce qui a servi, comme le fameux surplus d'émotion cité plus haut qui ne sera vu qu'une seule fois par exemple.


Que dire de la réalisation qui comme très souvent avec Pixar est superbe ! Que ce soit le chara design des nouveaux personnages ou celui de Riley qui a grandie, on est témoins d'une amélioration constante chez Pixar qui cherche toujours à exceller en la matière avec par exemple les différents souvenirs de Riley la montrant à l'âge où nous l'avions quitté lors du premier volet et qui nous semble méconnaissable. Et il est intéressant de remarquer que différents styles d'animations se mélangent dans le long-métrage, comme avec un personnage entièrement animé en 2D et qui malgré tout ne dénaturera pas avec le reste. Et bien que du côté de Joie et ses acolytes on retrouve souvent les mêmes lieux que dans le premier film, l'ensemble sait se renouveler pour permettre une redécouverte.


Enfin comment ne pas mentionner la musique qui là aussi parvient à bien coller au thème général du film. Composée par Andrea DATZAMN, on y retrouve des mélodies du premier mais aussi d'autres thèmes qui, s'ils collent à l'ambiance du film, ne m'auront néanmoins pas marqué plus que ça cette fois-ci.


Une suite qui manque d'émotions


Ainsi Vice-Versa 2 est une bonne suite même si pour ma part j'en suis ressorti malgré tout assez mitigé.


Le principal problème du film est qu'il se focalise sur le stage de Riley, il est donc regrettable qu'en dehors de deux minuscules scènes lors des premières minutes, le film efface complètement ses parents par la suite. Cela aurait été je trouve intéressant de voir des parents dépassés par les brusques changements de comportements d'une ado, ou de de suivre un parcours plus typique où l'anxiété aurait pu tout autant avoir sa place que dans un stage. De ce fait, les personnages secondaires comme l'équipe de hockey que Riley adule deviennent quasiment quelconques tant ils sont peu importants pour l'intrigue. Dans le premier opus, les parents de Riley apportaient quelque chose, car ils s’inquiétaient pour leur fille. Ici, même les amies de Riley sont finalement très oubliables et ne servent que trop peu à l'intrigue, et c'est réellement dommage...


À mes yeux, Vice Versa 2 est donc une bonne suite qui maîtrise son concept et parvient à l'approfondir davantage. Mais il est néanmoins dommage que la structure du film se cantonne à un lieu clos avec des personnages qui auront peu d'importance en dehors de l'acte final. On y perd également tout l'aspect poétique qui faisait le charme du premier avec ses moments de silence qui ici laissent place à 3 histoires parallèles au rythme effréné avec des scènes très codifiées pour faire rire les plus jeunes où finalement la seule émotion que j'ai ressenti, c'est l'ennui. Au final, seul le climax m'a vraiment parlé et est parvenu à me toucher.


De plus, on rappelle que le film parle de la puberté, l'occasion d'aborder 10 000 sujets. Je conçois qu'en 90 minutes, le film peut se retrouver limité dans ce qu'il cherche à raconter mais il y avait moyen de montrer d'autres choses. Alerte Rouge a très bien prouvé qu'on pouvait parler des changements physiques et psychologiques au sein d'un récit classique d'émancipation. Or ici, l'aspect psychologique est abordé d'une belle manière c'est vrai mais à travers un fourre-tout d'idées dont peu ressortent réellement et ce, c'est sans compter les nombreux personnages secondaires qui finalement ne servent pratiquement à rien.


Ainsi si Vice-Versa 2 cherche à rafraîchir sa formule en introduisant de nouveaux concepts en lien avec le premier film, il n'en demeure pas moins qu'une suite qui malheureusement cherche à égaler son aîné sans jamais y parvenir.

DuotakunoSora
6
Écrit par

Créée

le 28 juil. 2024

Critique lue 6 fois

Duotaku_no_Sora

Écrit par

Critique lue 6 fois

D'autres avis sur Vice-versa 2

Vice-versa 2
Sergent_Pepper
6

Dead alert

Il fut un temps où l’on attendait le nouveau Pixar avec excitation : le studio était devenu le maître de l’imaginaire, ayant su conjuguer les innovations visuelles de l’animation 3D avec une folle...

le 24 juin 2024

58 j'aime

6

Vice-versa 2
lhomme-grenouille
5

Vice-repetita

Il y avait-il de quoi être surpris, franchement ?Parce que, oui – attention révélation ! – Vice-versa 2 est à l'image de toutes les suites Pixar qu'on a vues fleurir cette dernière décennie : propre...

le 25 juin 2024

44 j'aime

10

Vice-versa 2
Plume231
3

Bonjour l'angoisse !

Depuis la toute fin des années 2010, Disney traverse la période la plus lamentable de toute son existence. Certes, le studio a connu, dans toute son histoire, de nombreuses perturbations, de...

le 18 juin 2024

42 j'aime

11

Du même critique

GhostWire: Tokyo
DuotakunoSora
6

Seul dans Shibuya

Accueillons avec joie cette fin, qui marque l'avènement d'un nouveau commencement !Un mystérieux brouillard s'abat sur le quartier de Shibuya.Dès que quelqu'un est touché par la brume, il disparaît...

le 23 mars 2023

3 j'aime

Platinum End
DuotakunoSora
3

Un duo culte livrant une œuvre oubliable et mauvaise au possible

Je suis venue pour te rendre heureux mais j'ai échoué... Mirai est un garçon dépressif. Alors qu'il est sur le point de se suicider, il va être sauvé par un ange appelé Nasse et recevra trois...

le 15 oct. 2021

3 j'aime