6 ans plus tard, le cinéaste singapourien Anthony Chen retrouve son acteur d'Ilo Ilo dans Wet Season, son deuxième long-métrage. Le jeune garçon est devenu adolescent et le réalisateur a troqué la chronique familiale pour une histoire tout en mélancolie, celle du premier amour pour le garçon en question, qui risque de ne pas durer plus longtemps que la mousson. Mais ce n'est pas lui le protagoniste principal, tout au plus sert-il de révélateur pour le personnage incarné par la très remarquable actrice malaisienne Yan Yan Yao. Ce portrait de femme au bout de son mariage et en mal d'enfant est un récit d'émancipation assez classique, fort joliment rehaussé par le style de Chen, sa pudeur et sa délicatesse, qui donnent une élégance raffinée à une intrigue qui aurait pu verser dans le scabreux. C'est loin d'être le cas et ce, même si on aurait aimé que les personnages secondaires soient davantage étoffés (le mari). Certes, le rythme de Wet Season est parfois languissant mais à plusieurs reprises le film nous surprend par une scène soit infiniment poignante, soit légèrement audacieuse. En filigrane, Anthony Chen évoque l'évolution de la ville-État qu'est Singapour, son quotidien au milieu des embouteillages noyés sous la pluie, comment la langue chinoise perd de plus en plus de terrain par rapport à l'anglais ou les opportunités, qui sont aussi des contraintes, pour des exilés voisins de la Malaisie. En somme, Wet Season est à la fois un voyage et une initiation. Contés avec un mélange réussi de douceur et de réalisme social.