Les premiers pas du futur géant Scorsese dans l'industrie du cinéma dévoilaient déjà une ambition et un sens de l'intensité dramatique peu communs. Dés l'introduction, on sent l'influence de la Nouvelle Vague, l'influence de la religion, qui se place comme juge et arbitre au sein du film et au sein de l'oeuvre du réalisateur italo américain, on sent l'envie de parler de la famille, du respect et on sent une esthétique photographique en parfaite harmonie avec les expérimentations de montage. A n'en pas douter, dés les premiers plans de ce Who's That Knocking At My Door ? l'empreinte Scorsesienne est placée, pour marquer plus de cinquante ans de cinéma.
Mais ces débuts ne sont pas sans défauts, malgré une première moitié excellente et terriblement prenante, la seconde partie déçoit légèrement, et plus particulièrement les vingt dernières minutes. A la manière du personnage principal (interprété par un Harvey Keitel magistral), le spectateur se sent un peu frustré devant cette histoire qui refuse tout à coup d'avancer et se retrouve bloquée à cause des principes contradictoires de ce même personnage principal.
Malgré tout, ceci est un choix que je considère artistique et voulu, je vais donc m'attarder à présent sur ses principales qualités. La direction d'acteur notamment : arriver à tirer d'un acteur faisant ses armes devant la caméra pour la première fois une telle intensité et une telle pureté de jeu, c'est juste du génie. Zina Bethune, légèrement plus faible, et tout de même largement convaincante de même que le reste des seconds rôles, déjà ancrés au niveau psychologique et esthétique dans la plus pure tradition scorsesienne. Le noir et blanc est véritablement travaillé pour nous proposer des plans tout en contraste et pas seulement des tons fades de gris. On ressent, dans le choix des costumes et des cadrages, l'envie chez Scorsese de montrer l'ambivalence psychologique de son duo principal qui le lie mais en même temps le détruit.
Le traitement sonore est éclectique, nous proposant plusieurs séquences entièrement régies par la musique des 60's, ou à l'inverse des passages dans le silence le plus complet. Des plans de caméra fixe se retrouvent en conflit avec des plans en caméra portée virevoltant dans l'espace.
Bref, une proposition de cinéma pure, dans tous les sens du terme, dans tout ce qu'il a de meilleur. Le résultat en est très intéressant, extrêmement plaisant au visionnage, forcément plus faible que le reste de son oeuvre, mais en tout cas un classique à voir sans hésiter !