L'avantage de X-Men : Days of Future Past, c'est qu'il permet de se rendre compte à quel point X-Men : First Class était un excellent film. Rien qu'à l'annonce de cette suite, le retour de Bryan Singer était déjà sujet à inquiétudes - réalisateur sur-estimé depuis le début des années 2000, loin d'être incompétent mais au style très plat et kitsch qui avait en grande partie entaché la première trilogie X-Men. Matthew Vaughn avait, avec First Class, apporté un vent de fraîcheur inattendu et euphorisant à la saga : classe, superbement mis en scène, et avec au passage un casting des plus exaltant, c'était, en plus d'être le meilleur film de la saga, l'un des films de super-héros les plus réussis de ces dernières années (si ce n'est le plus réussi). Le voir déguerpir ainsi et laisser sa place à Singer était donc très loin d'être une bonne nouvelle.
L'esthétique de cette suite connaît donc un changement radical, pour ne pas dire un retour en arrière. X-Men : First Class avait l'avantage d'apporter une dose de grandiose et de maîtrise de l'action qui manquait jusque-là à la saga, alors qu'ici Singer prouve qu'il est peut-être beaucoup de chose, mais certainement pas un cinéaste qui sait gérer le dynamisme et le charisme d'une scène. Le début de Days of Future Past est plus que laborieux, les scènes "futuristes" sont plus que kitschs, un bond visuel très difficile dans les années 80 - on se croirait presque devant les premiers Terminator. Passé des retrouvailles loin d'être réjouissantes avec le casting des films de la première trilogie (Hugh Jackman, Patrick Stewart, Ellen Page, Ian McKellen) et des seconds rôles dispensables (Omar Sy et toute sa clique), on est envoyé dans le passé. Le film commence enfin.
Et il faut dire que tout ce qui se déroule dans les seventies est nettement plus intéressant à défaut d'être aussi bon que le film de Vaughn. Quelques séquences très réussies (toute la scène du Pentagone, notamment grâce à un Quicksilver interprété par un excellent Evan Peters), mais globalement tout ça manque de force et de puissance. Michael Fassbender est toujours aussi bon mais Singer capte moyennement son jeu d'acteur, McAvoy est plus que sous-exploité, Hugh Jackman est juste assez charismatique pour ne pas agacer, Peter Dinklage est génial mais manque de temps à l'écran. Le film est loin d'être une catastrophe mais ne sort jamais du cadre du divertissement honnête. Mise en scène maladroite et souvent molle, casting trop important pour qu'on puisse s'attacher à qui que ce soit, allers-retours insupportables et anti-climatiques entre passé et future, acteurs bouche-trous... Ce Days of Future Past fait exactement les mêmes erreurs que les deux premiers films de Singer, l'ambition est là mais le metteur en scène pas assez talentueux pour rendre ça passionnant.
La conclusion la plus intéressante que l'on pourrait donner au film est que, là où Vaughn avait rendu classe un film qui se déroulait dans les années 60, Singer rend kitsch les scènes qui se déroulent dans un avenir lointain. Un paradoxe à l'image du film, une déception, certes, mais pas un ratage total. Le plus désolant restera de savoir qu'un tel scénario aurait pu donner quelque chose d'excellent dans les mains d'un faiseur de talent, là où Singer n'en retire qu'un produit foutraque, pas déplaisant mais terriblement anecdotique. Pas de bonne augure pour la suite, sachant que le bonhomme n'est pas prêt de laisser tomber son bébé.