Deux octogénaires amis d’enfance se retrouvent chaque année dans un somptueux hôtel suisse. Fred (Michael Caine) est un célèbre compositeur et chef d'orchestre. Trompant allègrement sa femme, cet égoïste n’a vécu que pour sa musique. Mick (Harvey Keitel) est un cinéaste reconnu qui a célébré la femme, toutes les femmes. Ils ont réussi, ils sont riches et ils s’ennuient. Les enjeux du film sont minces. Fred acceptera-t-il de remonter sur scène pour la reine d’Angleterre ? Mick parviendra-t-il à achever son dernier scénario ?
Autour d’eux, Paolo Sorrentino nous propose une farandole de seconds rôles, la fille du maestro en crise conjugale, un acteur préparant son prochain rôle, une ribambelle de scénaristes, une surprenante miss univers, un couple distingué et mutique et, de l’autre côté de la barrière de l’argent, une masseuse, une prostituée et un professeur d’escalade.
Bâti tout en longueur, l’hôtel thermal présente de faux airs de gare, de grand luxe. Le personnel est jeune, prévenant et silencieux. Nus et alanguis, les clients âgés et fatigués reposent dans les piscines. Nous les retrouvons élégants, mais guère plus bavards, le soir au restaurant, puis face à un artiste en représentation. De bassins froids en bassins chauds, de massages appuyés en bains de boue, de flâneries sans but dans les couloirs interminables aux conversations de salon, les très vieux très riches, les jeunes artistes prometteurs mais déjà usés, les anciennes gloires du sport ou du cinéma et quelques héritiers s’ennuient ferme.
Seuls Fred et Mick parlent. À défaut de vivre, ils observent, commentent, supputent, parient ou plongent dans leurs souvenirs. Ils parlent de sexe, de prostate, des femmes qu’ils ont désirées, de sexe encore. Si l’amitié entre les deux vieillards est finement écrite et brillamment interprétée, leurs remords tardifs sont peu crédibles. Après quelques idées sur la vie et la mort, ils multiplient les truismes sur l’art et la création, le cinéma et la musique. « Les émotions, c’est tout ce qui nous reste. » « Le désir est plus fort que l’amour. » À l’image de la montagne helvète, leurs échanges sont vides et la musique lourdement signifiante. Souvent belles, les images peinent à sauver un ensemble vain.