On dira ce qu'on voudra de Ninja Theory, ce studio se bonifie avec l'âge. Alors sous le nom de Just Add Monsters, ils ont réalisé en 2003 Kung Fu Chaos sur Xbox, une sorte de Mario Party déjanté mêlant allègrement ambiances de tournage de films, arts martiaux et personnages tout fous. Il y a certes Heavenly Swors qui reste décrié, faisant surtout office de démonstration technique de la PS3 et de publicité dans la série TV Heroes, mais certains aspects comme la mise en scène ou le némésis avaient des aspects intéressants. Et maintenant, DmC: Devil May Cry est sorti, certains le qualifiant de jeu de Ninja Theory le plus abouti.
Entretemps, il y eut Enslaved: Odyssey to the West.
Comme beaucoup sûrement, j'avais entendu parler de ce jeu à travers les sites et les magazines et ayant apprécié Heavenly Sword, c'est avec plaisir que je m'essayais à la démo de ce nouveau jeu du studio. Elle présentait le début du jeu et tout de suite, j'accrochais à la jouabilité nerveuse et à la mise en scène travaillée. Cependant, mes priorités ludo-numériques étant ce qu'elles sont, ce n'est que plusieurs années plus tard, à la lueur d'une belle occasion (16€ pour ce jeu plus la trilogie Starwars I-II-III en Bluray, difficile de refuser tout de même !) que je me plongeais dans les aventures de Monkey et Trip.
Et il faut reconnaître qu'au niveau de l'esthétique et du design, les petits gars de Ninja Theory ont fait fort. Même 3 ans après sa sortie (certes, la nouvelle génération de consoles HD vient seulement d'être annoncée et je ne joue pas sur PC), les paysages d'Enslaved sont magnifiques, la modélisation des personnages est sympa même si elle manque parfois d'expressivité et qu'ils paraissent trop être en plastique, mais les ennemis robotiques rattrapent tout ça. Je rechigne à nouveau contre le frame rate qui descend trop souvent à mon goût sous les 30 images par seconde mais là, je crois que je suis perdu pour la cause....
L'histoire d'Enslaved nous fait contrôler Monkey, un être surhumain aux caractéristiques simiesques évidentes qui se fait contrôler par Trip, une humaine qu'il rencontre par hublot interposé, via un serre-tête. Elle va alors l'obliger à l'aider à l'accompagner chez elle. Cependant, cette relation va évoluer tout au long du jeu presqu'exactement comme celle de Kuzco et Pacha dans le film de Disney (on a les références qu'on a mais ça n'en reste pas moins vrai !). Et en fait, c'est finalement pour moi l'un des reproches que je ferai à Enslaved : c'est Trip qui contrôle Monkey mais le joueur joue Monkey et garde quand même le contrôle du jeu ! La linéarité du jeu arrange bien les développeurs qui mettent finalement de côté le contrôle de Monkey par Trip (sauf au tout début et en fonction de la distance) car ils n'ont pas le choix : impossible de ne pas permettre au joueur de perdre cette impression qu'il a le contrôle du jeu. C'est ici l'essence même du "contrat" passé entre les développeurs et le joueur.
L'histoire mène les deux héros vers l'ouest en quête du bercail puis de vengeance dans un monde post-apocalyptique dans lequel la Nature a repris ses droits. En effet, Trip rejoindra son village et le découvrira mis à feu et à sang par les Esclavagistes et jurera de tuer leur chef. Petit à petit, on découvrira que ces "Slavers" sont contrôlés dans la Pyramide par un être tout droit sorti de Matrix dont le postulat est qu'une vie rêvée idyllique vaut mieux qu'une vie réelle dramatique. La fin se termine sur ce questionnement sans apporter de réponse car chacun est libre de ses choix. La meilleure réponse sera celle de Trip qui assouvira sa vengeance avant que Monkey ne tombe complètement fasciné par le monde rêvé, qui n'est autre que notre monde réel !
Le système de jeu est en fait une copie carbone de celui d'Uncharted à quelques points près. En effet, il s'agit ici d'un TPS dans lequel le personnage peut se battre à mains nues ou avec une arme et avec également une bonne dose de phases de plate-formes qui mettront en avant les facultés physique de Monkey. Car comme l'habileté et la résistance de Nate sont assez incroyable pour un vrai humain, Ninja Theory s'est intelligemment sorti de ce piège en utilisant un personnage extra-humain qui en plus leur donne de la matière pour le thème général du jeu et les possibilités de gameplay avec la légende de Son Goku et son voyage en Occident, fable chinoise millénaire dont s'inspire également Dragon Ball. Monkey se contrôle donc exactement comme Drake mais il est bien plus rapide, plus vif et plus fort, ce qui permet d'apprécier d'autant plus les phases de grimpette mais qui augmente aussi les problèmes parfois présents avec Nate de contrôle de la direction (quand on veut aller dans une direction mais que l'on a déjà entamé une séquence d'animation vers une autre, Monkey sera plus lent à reprendre la direction voulue).
Parmi les différences avec Uncharted, on notera l'absence de puzzles mais la présence d'un bâton magique capable de servir de "bo" et d'arme de jet avec deux types de projectile (un pour blesser et l'autre pour étourdir) et du "nuage" magique qui permet à Monkey d'aller plus vite et de surfer aussi sur l'eau.
Le système de combat est assez simple. Monkey se bat essentiellement avec son bâton, dispose de quelques combos, peut passer facilement d'un ennemi à l'autre, de contrer, de passer derrière un ennemi,... D'un simple bouton, on active le mode projectile du bâton, d'un autre le nuage magique et tout ceci permet d'avoir des combats assez variés, beaucoup plus que ceux d'Uncharted mais certes pas au niveau de ceux d'un Batman de Rocksteady Studios. Notons tout de même un petit effort de mise en scène avec le dernier coup du dernier ennemi qui bénéficie d'un zoom et d'un angle de caméra qui met en valeur un Monkey furax comme pas deux !
Mais toutes ces possibilités ne seront pas accessibles dès le début car un système d'upgrades apparaît au deuxième chapitre. En dépensant des orbes qu'on trouve un peu partout, Trip a la capacité d'améliorer la vie, le bouclier, le bâton ou les mouvements de combat de Monkey. Voici un petit élément RPG qui fait plaisir. Mais finalement, en parlant de Trip, ce qui fait le plus plaisir est son IA. Pour une fois, voici des développeurs qui ont atteint un bon compromis pour l'intelligence artificielle du personnage secondaire qu'on doit se coltiner. Elle est présente mais pas imposante, elle permet d'avoir des options supplémentaires sans être indispensable. Les moments où elle est vulnérable sont contrôlés et on n'est jamais surpris par sa mort (qui entraîne la notre, évidemment mais c'est dans l'histoire dès le départ). Bref, on est loin d'une Yorda jolie mais un peu boulet ou d'une Shiva trop audacieuse mais qui ne peut pas gérer ses bêtises !
En bref, j'ai vraiment aimé cette aventure dont les musiques sont sympas même si seule le thème principal m'a vraiment touché. Comme je le dis plus haut, il s'agit d'un TPS de bonne facture, avec un design magnifique (du moins pour les décors), un système de combat dynamique et avec des upgrades, une jouabilité presque tout le temps tip top, agile et rapide. Finalement, le vrai gros reproche de ce jeu est qu'il a du mal à se démarquer. Il fait tout pas mal mais rien ne le fait vraiment sortir du lot. C'est sans doute pour ça qu'il n'a pas trop marqué les esprits.