Final Fantasy XVI
6.6
Final Fantasy XVI

Jeu de Square Enix (2023PlayStation 5)

Il y a à peut prêt autant de définitions de « ce que doit être un Final Fantasy » que de joueurs de Final Fantasy. Pour preuve, il ne se passe pas deux semaines sans qu’un débat à leur sujet soit lancé. Quel est votre FF préféré ? Quel a été votre premier FF ? Quel FF rêveriez-vous de voir remaker ? N’oublie pas de t’abonner hein… A chaque sortie c’est également les mêmes choses qui tournent en boucle. Face à cette définition très personnelle de ce que devrait être un Final Fantasy on se retrouve alors systématiquement, à chaque nouvel opus sorti, face à cette déclaration : « Ce n’est plus un Final Fantasy. »


Nous allons donc laisser de coté les grandes déclarations alarmistes déclamées les yeux encore humides et essayer d’analyser ce Final Fantasy XVI en tant que jeu, tout simplement. Car revenir inlassablement vers son nom c’est probablement le pire angle d’analyse possible tant la saga n’a de cesse de tenter, d’évoluer et de prendre des risques. C’est à mon sens ce coté « labo d’expérimentations » qui lui donne toute sa personnalité et qui la rend si passionnante à analyser depuis ses débuts.


Bien que je n’aime pas intégrer des comparaisons à mes critiques, je vais exceptionnellement au contraire construire la mienne autour de ce modèle, via d’autres jeux, d’autres univers. Pourquoi ? Parce que je trouve que certains exemples seront assez parlants tant ce Final Fantasy est un pastiche de choses.


Alors ? Final Fantasy XVI est-il un bon jeu ?


Clive Redfield ? Chris Rosfield ?


Vous incarnez un commando qui va arriver dans un manoir rempli de zombies et…. Ah non lui c’est Chris Redfield…. Reprend toi ! Vous incarnez Clive Rosfield, fils ainé de l’archiduc de Rosaria. Vous êtes le protecteur de votre frère Joshua qui est l’émissaire du Phoenix. Les émissaires sont des humains ayant la capacité de faire appel aux primordiaux, des entités élémentaires dévastatrices, celle la même qu’on appelle nous autres joueurs, les invocations. Via une des intro les plus poussives qu’il m’ait été donné de faire, on va découvrir par un long flashback comment notre héros est passé de nobliaux à esclave pestiféré puis suivre ses aventures dans Valisthéa au gré des bouleversements de sa politique.


L’écriture : Game of Throne sans substance


Les jeux japonais à l’inspiration post Game of Throne ont pas mal fleuris ces dernières années. On sentait le fantôme de la saga de Georges R.R.Martin planer par exemple sur un Fire Emblem Three Houses ou encore sur un Triangle Strategy. Avec sa promesse d’un univers mature et orienté Dark Fantasy pas étonnant que la référence du genre sur petit écran ait été une source d’inspiration pour les équipes de Final Fantasy XVI. Sauf qu’a l’arrivée c’est un Game of Thrones incompris qui nous est récité. Comme si les équipes n’avaient pas mis le doigt sur ce qui faisait la singularité de l’écriture de GRR Martin. Plus que de l’inspiration, on est parfois même sur du recopiage de certaines scènes, certaines répliques, certains archétypes de personnages. On va nous conter une histoire de conflits géopolitiques en déballant des noms de contrées, de royaumes, de duchés, de familles mais sans que l’on vive assez d’événements pour se les approprier complètement. Sans que l’on puisse les caractériser distinctement. On a juste la sensation d’être embrouillé dans des enjeux qu’on voudrait nous faire croire comme étant grave, mais qui nous semble si lointain au niveau de l’implication. Le jeu possède une façon pourtant intéressante d’épaissir son lore par le biais d’une pause active qui donne des définitions de lieux personnages et événements à tout moment. Plus tard nous aurons même accès à une historienne pour replacer le contexte géopolitique du moment. Mais soyons honnête, vivre une histoire à moitié pendant le jeu et devoir lire l’autre moitié restante dans des menus… Qui a le temps pour ça en 2023 à l’heure où l’on a 50 jeux à faire ? Qui a envie de s’impliquer dans la géopolitique pas très bien écrite d’un A-RPG en se mangeant des tartines de textes en plein milieu d’une cinématique ou entre deux missions ? Pour un jeu qui a déjà un gros problème de rythme général, voila qui vient alourdir la note…


Le système de combat : Devil May Cry light


Ils l’avaient annoncés, Final Fantasy XVI est donc un « action RPG » (même si l’équipe tenait à faire tomber la notion de RPG qu’elle trouvé désuète… A posteriori on comprend mieux pourquoi.) Plutôt nerveux le système de combat offre de belles sensations, un peu moins en terme de feedback puisque les monstres ne réagissent pas à nos assauts tant que leur jauge d’endurance n’est pas entamé à moitié ou complètement. Cela donne une drôle de sensation parfois de voir qu’une animation ne sera pas stoppée ou ralentie en dépit du fait que Clive met 50 coups d’épées. Cela reste raccord avec le système qui demande d’entamer les barres d’endurances cependant.


Il est donc possible de donner des coups d’épées basiques, d’envoyer des projectiles, mais aussi de faire appel à des coups spécifiques à l’émissaire équipé (3 peuvent être équipés au maximum que l’on peut switcher à la volée). Je n’en dirai pas trop mais globalement les coups ont soit tendance à grignoter surtout la barre d’endurance, soit à favoriser les dégâts bruts. Le reste étant surtout une histoire de mobilité, soit par l’utilisation de dash afin d’atteindre un ennemi lointain, soit de grab pour attire un ennemi plus prêt. Il y a d’autres petits ajouts à base de projectiles ou de pièges à poser sur la surface du sol afin d’attirer les ennemis dedans mais rien qui ne va finalement bouleverser la façon de jouer.


Et c’est bien la ou le bât blesse. Très rapidement on aura compris comment fonctionne les combats et aucun d’entre eux ne va vous obliger à repenser notre façon de jouer. On utilisera systématiquement les mêmes combos, peu importe l’ennemi. Non pas parce que je m’en contente alors que le système serai supposément propice à des combos variés et infinis. Ce n’est pas le cas. C’est un peu de la poudre aux yeux cette prétendue variété. Le système n’est pas aussi profond qu’on souhaiterait le faire croire et il repose en réalité sur quelque chose d’assez binaire. D’abord faire fondre la première moitié de la barre d’endurance, puis faire tomber l’ennemi, utiliser Garuda pour faire fondre la 2éme moitié de la barre d’endurance, et lorsque l’ennemi est vulnérable balancer tout les coups spéciaux. Et on recommence. On place quelques esquives, on bourre carré pour baisser la première barre d’endu et blabla…. Pendant 35-40 heures.


Rendez vous compte, il n’y a même pas un système d’affinité élémentaire. Si vous voulez tuer un élémentaire de feu avec…. Des attaques de feu ? Et bien c’est OK ! Pas de bonus, pas de malus… Eteint ton incendie avec de l’essence. Ta gueule c’est magique…

C’est vraiment dommage car les sensations sont franchement agréable manette en main mais ça s’essouffle tellement vite… J’ai ressenti de la lassitude au bout de 13 ou 14 heures alors qu’elles incluent au moins 5 heures de cinématique dans le lot…


La progression : Tales of Arise artificiel // L’exploration : Petit feel Dragon’s Dogma

Moi qui déteste les jeux à la progression artificielle… Autant dire que j’ai été servi. La notion de niveau n’a absolument AUCUNE importance. Le passage de niveau n’est qu’un artifice visuel pour donner un air vaguement RPG qui en réalité n’existe mécaniquement pas. Déjà parcequ’en terme de statistique, le gain d’un niveau à l’autre est dérisoire mais il est également très scripté. Une logique MMO voulant qu’un ennemi un peu plus faible ne rapporte presque plus d’XP et qu’un ennemi un peu plus fort soit un mur de difficulté (ou d’emmerdement car sac à PV) aura tôt fait de baliser la progression selon l’avancée du scénario. Un principe que je déteste en l’occurrence. Mais bon puisqu’en réalité le levelling n’apporte pas grand-chose de plus « pourquoi pas ».


Le problème c’est que dans ce cas, quelle motivation à se balader ou affronter les créatures qui peuplent les plaines et forets entre un point de départ et une destination ? A quoi bon « explorer » le peu que l’on nous donne à explorer ? Quelle intérêt à faire des quêtes annexes ? On pensera naturellement à un loot éventuel, une carotte, de l’équipement, un pouvoir, des ressources… Que neni. L’annexe en plus d’être ennuyeux au possible ne propose en guise de carotte que des ressources que l’on trouve déjà en abondance juste en marchant et ouvrant des coffres. Des ressources qui voudraient nous faire croire en la possibilité d’évolution de notre stuff. Et bien non puisque toute les 2 ou 3h vous aurez de toute façon par le biais de la quête principale du nouvel équipement qui vous remettra à niveau pour les 3 prochaines heures de jeu. Aucun intérêt donc à se pencher sur le système de craft présent, lui aussi complètement inutile et artificiel. D’ailleurs imaginons qu’il vous manque un objet de craft pour faire évoluer votre matériel (ce qui n’arrivera pas puisque ce n’est absolument pas nécessaire) et bien vous pourriez l’acheter avec vos gils qui n’ont de toute façon aucune autre utilité que d’acheter des potions (et des partitions de musiques au prix exorbitant pour, une fois de plus, justifier l’existence d’un truc implanté à la truelle afin de coller aux codes de la saga….). Même le système monétaire, les légendaires Gils, n’ont aucune utilité dans le monde de Final Fantasy XVI.


Le grand numéro d’illusionniste ne s’arrête pas la. Les décors en sont également le parfait exemple. Très rapidement on va comprendre que les cartes du jeu sont des couloirs menant à des arènes menant elles mêmes à des couloirs. Un monde qu’on tente de nous faire croire gigantesque mais qui tient dans un mouchoir de poche. Exemple : Le flashback en début de jeu nous permettra de parcourir le château de Rosalia. Mais quelle vaste blague ! Un château + son village équivaut à 3 écrans dont TOUTES les issues sont bloquées par des charrettes, des portes fermées (comme 95% des portes du jeu qui ne sont qu’un décor) ou des personnages vous bouchant le passage. Un seul chemin en serpentin pour une ville et son château ? Comment croire à ces décors en carton pâte honnêtement ? Même histoire pour les forêts bloquées par des pierres ou des rondins. Le désert ? Un PNJ nous dit de faire attention à ne pas nous perdre dans cet incroyable désert. Mais frérot il est grand comme le jardin de ma grand mère comment tu veux que je me perde au juste ?


Et le bestiaire alors ? Il faut qu’on en parle. Il est rachitique au possible, autre point commun avec Tales of Arise. Le reskin de certains ennemis est même franchement exagéré. Le Troll sera le même ennemi que le chef des brigands, que le bourreau, que le troll éthéré ou que le minotaure. Les mêmes mouvements, les mêmes attaques et donc les mêmes esquives, les mêmes combats... Des loups, des araignées, des abeilles, des soldats, des gobelins, des raptors (oui oui…) des plantes… Il existe au final très peu de créatures différentes. Une fois encore il ne faudra pas attendre bien longtemps avant de constater cette redondance dans le turn-over des ennemis. Le temps passe et le maquillage fond sur le visage de Final Fantasy XVI laissant apparaitre son vrai visage.

La mise en scéne : Asura Wrath premier degrés.


Final Fantasy XVI incarne parfaitement les ambitions démesurées d’un Square Enix qui se rêve encore à la pointe de la technique, comme à l’époque PS1 / PS2. Un Square Enix qui n’accepte pas d’avoir été dépassé sur le plan de la performance. De leurs propres aveux l’équipe visait un jeu japonais qui marche dans les pas d’un God of War, d’un The Witcher ou encore d’un The Last of Us techniquement. Et l’impression que ça donne c’est qu’on en a oublié que c’est dans les détails que se cache l’excellence. D’accord les combats de primordiaux en jettent en rappelant les combats de Kaijus, mais à coté de ça il y a des animations d’une rigidité qui nous ramène au pire de l’ère PS2/PS3. L’animation de Clive qui prend un objet ou donne un objet à un autre personnage… C’est d’une longueur ! Ce bras qui se tend hors écran pour revenir à sa position initiale de façon robotique, désolé mais dans les productions cités juste avant on ne verrait jamais ça. Et ce n’est pas « grave » en fait. Personnellement la technique je m’en fou. Mais à partir du moment où d’un point de vu marketing on te vend un truc chiadé et qu’en fait hormis les grands moments c’est hyper inégal on ne peut pas faire comme ci ça n’existait pas. Surtout quand la plupart des efforts ont été mis dans ça au détriment du reste. Voir un PNJ se retourner sur lui-même pour prendre la fuite à 2 à l’heure et que les personnages restent sur place pour finalement lâcher « ah mince il s’est enfui »… Désolé mais ça prête à rire (de désespoir).


La musique : Nier dans les villages, FFXIV dans l’action


Je sais que le compositeur du jeu, Masayuki Soken, possède une aura très particulière. Un des hommes providentiel de la résurrection de FF XIV dont la bande son jouie d’une fort belle réputation, frappé par de graves problèmes de santé qui ne l’ont pas découragé à continuer son travail de composition même à l’hôpital. N’étant pas attiré par les MMO j’ai donc découvert son travail avec ce 16éme opus. Et si je dois reconnaitre que dans les moments d’actions, les compositions dégagent une belle puissance orchestrale, je mets plus de réserve sur les compositions d’ambiances. J’ai trouvé ces morceaux plus oubliable, certains lorgnant du coté des morceaux d’ambiance de Nier mais en étant mélodiquement moins entêtant. Je ne retiendrai d’ailleurs pas grand-chose au global de cette bande son. Elle est efficace, plutôt à propos mais jamais transcendante ou presque. La faute à des mélodies qui n’élisent pas domicile dans notre tête une fois la console éteinte. Petite déception même si l’ensemble se tient bien. Je me repencherai surement sur la bande pour voir ce qu’elle donne dans le cadre d’écoutes hors contexte. A titre de comparaison et selon mes gouts personnels, la bande son d’Octopath Traveler 2 mérite bien plus de louange et a plus de prétention dans les OST de l’année.


Ce que Final Fantasy XVI est et ce qu’il n’est pas.


Final Fantasy XVI n’est pas un RPG. Même pas un peu. C’est un jeu d’action aventure cinématique. Ni plus ni moins. Un enchainement de couloirs et de petites zones à la Tales Of débouchant sur la prochaine arène ou la prochaine cinématique. Le problème c’est qu’il n’est même pas un bon jeu d’action-aventure. Trop bavard, rapidement répétitif, pas assez profond dans ses mécaniques, faussement RPG pour justifier son nom… Il est à mes yeux le mélange d’une mauvaise série Netflix qui copierait GOT avec un jeu rapidement ennuyeux manette en main.


Conclusion


Le fait de coucher les mots m’a fait prendre conscience d’à quel point j’avais été déçu. Plus j’avançais dans la rédaction de mes impressions, plus j’avais la dent dure sur le jeu. Mais qu’est ce que mon passage sur Final Fantasy XVI m’a apporté concrètement ? Et bien je ne trouve pas une seule chose à mettre en avant… Il n’interroge pas son médium, ne le fait pas avancer, n’est ni spécialement fun ni passionnant, mal rythmé, il n’arrive même pas à régurgiter correctement les influences qui sont les siennes. Je ne retiens pas de personnage particulier. L’écriture est à mon sens un ratage total… Ce qui m’amène à une note qui va surement être une des plus basses parmi les critiques du jeu. Un point de plus que le XV car il a au moins la politesse d’avoir un début et une fin. Final Fantasy XVI n’était clairement pas pour moi.


Pourtant j’y ai cru vous savez. Alors que je ne croyais plus en Square Enix depuis très longtemps, surtout sur sa saga principale. Une flopée d’interviews pleines de promesses, un récital plein de repentir écrit de main de maître par le département marketing et répété par les développeurs avait réussi à me donner un peu d’espoir. « Nous vous avons entendu ». Au moment de juger sur pièce on ne peut que constater qu’il n’en est rien. A trop vouloir piocher dans tout ce qui a marché ces dernières années, Square Enix nous livre un Frankenstein du jeu vidéo où rien ne va. Au lieu d’être plus que la somme de ses inspirations il est moins qu’une seule d’entre elle. Je l’ai traversé sans plaisir. J’ai subit les trois quarts de ses dialogues. Je me suis forcé à faire son annexe. J’ai été soulagé de l’avoir fini. Le prétendant à ma déception de l’année est tout trouvé. Finalement, une seule promesse aura été tenue. Celle d’un jeu fini à la sortie. Et c’est d’autant plus décevant…


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le 30 juin 2023

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Joo-Hwan

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