Les gens qui me connaissent le savent : GTFO et moi n’étions pas faits pour nous rencontrer. Encore moins nous apprécier. Mon truc à moi, ce sont les jeux de stratégie. Un petit RPG par-ci, un peu de construction de base par là, une dose de survie pour pimenter le tout et vous pouvez m’abandonner le cœur léger devant un écran. Néanmoins, à de rares exceptions prêtes, les FPS et moi ne nous mélangeons pas, question de principe. Au risque d’en décevoir plus d’un, je suis également incapable de jouer à un « souls-like ». J’ai bien peur que la nature ne m’ait dotée d’une patience bien trop ténue pour que je puisse prendre du plaisir sous les coups de butoirs de la frustration. N’y voyez aucun élitisme de ma part ; en bon miqote moderne et tolérant, je comprends tout à fait qu’on puisse y trouver son compte et je suis d’ailleurs assez admiratif des amateurs du genre. Du coup vous vous doutez bien que je ne me suis pas extasié quand GTFO a fait son apparition dans la liste des « élus » proposé par mes amis joueurs. Un FPS d’horreur à la difficulté notoire ? Quelle idée ! Il leur a d’ailleurs fallu faire preuve d’une capacité certaine de diplomatie (comprendre corruption) pour arriver à me convaincre.
Car oui, ce GTFO est avant tout un jeu d’équipe. Vous pouvez certes partir en solo (et tester votre niveau d’endurance sur l’échelle du masochisme) ou avec des inconnus (et tester votre niveau d’endurance sur l’échelle de la toxicité sur internet), reste que l’expérience est avant tout pensée et calibrée pour une équipe de 4 personnes en vocal. Je n’insisterai jamais assez sur ce point ; toute la saveur de ce titre repose sur le travail de groupe. Vous êtes une escouade de mercenaires / prisonniers envoyée pour nettoyer les bas fonds d’un étrange bâtiment dont chaque étage (selon moi) équivaut à un cercle de l’enfer. Ce building est rempli de créatures glauques, pour la plupart aveugles et assoiffées de chaire fraîche, qui ne rêvent que de vous dévorer si vous avez le malheur de les réveiller. Vous partez pour chaque « plongeon » équipés de deux armes et d’un petit package qui vous rassure dans un premier temps, avant de comprendre que chaque munition sera malheureusement comptée. Il est rapidement évident que vous allez devoir faire preuve de discrétion et de patience si vous espérez survivre, et que votre arme contondante est votre meilleur atout.
La lumière, que ce soit celle de votre environnement ou de votre lampe-torche, joue un rôle primordial dans votre approche des différentes missions. Étant donné que les monstres y sont sensibles, vous devez sans cesse faire attention à ne pas les éblouir alors que la pénombre ambiante vous force néanmoins à l’utiliser. La gestion du bruit est également de la partie, les vilaines bestioles ayant une très bonne ouïe, tandis que la vôtre est mise à rude épreuve pour éviter les ennuis. Inutile de préciser qu’ouvrir la moindre porte ou que taper sur un clavier devient une épreuve à part entière nécessitant le soutien de tout le groupe. Et pour finir, comme ces êtres démoniaques communiquent également entre eux, vous êtes forcé de coordonner et synchroniser toute tentative de faire couler le sang. Vous l’aurez compris, la tension est permanente au sein de cette prison cauchemardesque, d’autant plus que les points de sauvegarde se font rares et que toute action précipitée peut entraîner la mort du groupe. Je ne rentrerai volontairement pas dans les détails du bestiaire que vous pourriez rencontrer sur place, mais chaque niveau apporte son lot de surprise, rarement bénéfique.
Certains passages vont vous obliger à sortir la grosse artillerie et s’il est dans un premier temps jouissif d’appuyer enfin sur la gâchette, c’est pour mieux comprendre ensuite à quel point les munitions sont rares et importantes. C’est dans ces moments-là que les drones et autres tourelles brilleront et chacun devra faire preuve d’intelligence dans leur placement afin de couvrir le plus de couloirs possibles, tout en se ménageant des possibilités de mouvement. Il est tentant de penser que le jeu récompense les meilleurs tireurs (c’est évidemment un plus), mais les amateurs de tactiques et de formations auront souvent de bien meilleurs résultats que les habitués du GIGN contre terroristes.
Les graphismes, sublimes malgré la noirceur omniprésente et surtout les jeux de lumières, apportent un réel cachet au jeu. Un petit mot également sur le sound design et la bande son - que j’ai tendance à oublier dans mes critiques -, vraiment réussis et qui participent activement à l’immersion. Le travail sur l’ambiance est tout bonnement remarquable et c’est au moment où la mission s’achève enfin (en bien ou en mal) que l’on se rend compte à quel point stress et tension s’étaient accumulés. La difficulté est bel et bien au rendez-vous, pour le meilleur et pour le pire, même si pour ma part « l’effet groupe » a su tenir à distance la crise de nerf. Il n’en reste pas moins une véritable fierté que de passer certains niveaux retords, après des heures d’acharnement et d’essais en tout genre.
GTFO n’est évidemment pas à mettre entre toutes les mains. C’est un jeu qui demande de la rigueur et de l’application sur de longues périodes de jeu, éprouvantes pour le corps et l’esprit. Les sentiments de malaise et d’oppression qui suintent du titre pourront en rebuter plus d’un. Néanmoins, derrière cette carapace sombre se cache un jeu d’une grande profondeur et richesse. Nous reparlons encore aujourd’hui de GTFO entre nous, tel de vieux guerriers revenus de l’enfer quelque peu traumatisés par le combat, signe qu’il a su faire mouche et nous marquer de son empreinte.
Rien n’est plus dangereux qu’un Miqote dans l’impossibilité de fuir
[Cette critique se base sur mon expérience de jeu début 2023, ce dernier évoluant quotidiennement.]