Il y a quelque chose dans Ico qui me bouleverse profondément sans que je me l’explique. Il y a quelque chose dans cette relation asymétrique entre ce garçon maladroit et cette fille spectrale. Il y a quelque chose dans cette architecture gigantesque, vestige d’une époque qui semble profondément révolue. Il y a quelque chose dans cette boucle musicale que l’on entend lors des sauvegardes qui me touche profondément.
Ce qui relie tout cela, c’est la volonté de Fumito Ueda de créer une expérience résolument poétique et romantique, dans le sens où la ruine d’un temps immémorial semble être le thème principal. Plus besoin de rappeler l’aspect absolument avant-gardiste de ce jeu, sans lequel on n’aurait sans doute jamais vu certains épisodes de Zelda, Demon’s Souls ou encore Inside (et la liste est longue).
J’ai vraiment été frappé par la modernité du jeu, encore aujourd’hui, que ce soit par la construction d’une narration simple mais puissante, ou par les aspects du gameplay avec des séquences de plateforme et de puzzle qui, certes, sont un peu répétitives, mais restent efficaces et inventives. Les combats, en revanche, sont un peu décevants, et on lève les yeux au ciel quand un portail noir s’ouvre au sol. Ce n’est pas la partie intéressante du jeu, et il me semble même qu’elle est presque volontairement déceptive : on ne gagne absolument rien à combattre, pas d’XP, pas de bonus, rien.
L’animation des personnages est absolument incroyable. La façon dont Yorda se comporte est très naturelle. C’est rare de voir un personnage de jeu vidéo hésiter avant d’agir et ne pas “obéir” immédiatement à nos actions comme un petit soldat. La dynamique entre les deux protagonistes est exemplaire. L’utilisation de la touche R1 pour tenir la main est absolument révolutionnaire : Ico court plus vite qu’elle, et lorsqu’elle s’agrippe à lui pour se déplacer, la manette vibre, traduisant la tension qu’il y a à la tirer. C’est du retour haptique avant l’heure.
Cette relation entre les deux personnages est véritablement la colonne vertébrale du jeu. Yorda étant bloquée par un obstacle, notre objectif principal est de l’aider à avancer. Si on s’éloigne trop d’elle, des ennemis apparaissent. Cette simple mécanique crée de l’empathie et du souci, ce qui est rare dans un univers vidéoludique qui favorise souvent des actions plus individualistes.
Ico s’inscrit dans le trope classique du “jeu où il faut sauver la princesse”, sauf qu’ici, l’aventure ne se termine pas une fois l’objectif atteint : elle commence avec le trajet à parcourir à deux. La sauve-t-on d’ailleurs vraiment ? Je laisse cette question en suspens.
Maintenant, c’est décidé : le jeu que j’attends le plus en 2025, c’est le prochain Fumito Ueda.