Un sentiment de perfection continue... mais sans surprise

Il y a quelque chose d'étrange avec ce jeu. Un ressenti assez spécial, au vu des critiques, que j’ai vécu du début jusqu’à la fin.

Pour cela, il faut que j'explique le contexte : le jeu sort le 14 Juin, je me mange des tonnes de tests et articles dithyrambiques venant de tous les sites de jeux vidéo, on nous le qualifie comme “jeu de cette génération”, “Citizen Kane du jeux vidéo”... Alors évidemment, je suis prêt à vider ton porte-monnaie de quelques dizaines d’euros pour y jouer. Et là, je le reçois (entretemps, les premiers avis de joueurs négatifs commencent à sortir parmi la masse d’éloges). Je fais le vide dans ta tête, j’ai quasiment pas vu de trailers du jeu jusque là, juste les notes des sites, je me dis que le meilleur moyen de savoir si le jeu est bon, c’est de me forger son propre avis... et là, je lance le jeu.

Si on met de côté le prologue qui prend aux trippes, The Last Of Us (non, je ne l’appellerai pas TLOU, c’est trop moche) se vit de la même manière que pour les héros du jeu : un vrai voyage, presque une quête initiatique, façon “La Route” (en méchamment plus coloré). On y retrouve un des aspects que j'adore le plus dans des jeux comme BioShock : chaque lieu, chaque bâtiment, chaque note manuscrite a une histoire à raconter, est une invitation à découvrir ce qui s'est passé, à farfouiller pour récolter les ressources qui pourraient être utiles à la survie. Certes, le terrain de jeu n'est pas aussi riche que Rapture, mais reste suffisamment consistant pour se satisfaire.

Naughty Dog, Uncharted. Tout le talent qu’on peut attendre de ce studio se ressent dans le jeu : les décors fourmillent de détails (le chaos n’a jamais été aussi beau), les animations sont d’une fluidité à nous faire oublier qu’on a affaire à des personnages de jeux vidéo, et la mise en scène est globalement maîtrisée. Contexte oblige, nous n'avons heureusement pas droit à des scènes "No no no no NO !"-style, mais à quelque chose de moins spectaculaire, de plus humain (de plus “cohérent” on va dire).

Le talent du studio se ressent aussi au niveau des dialogues, de bonne qualité (j'ai joué en VO), et surtout les dialogues de Ellie. Ok, encore une n-ième itération de la fille à protéger (salut Lee et Booker). N’empêche, elle m'a marqué par sa qualité d’écriture dans les dialogues (ainsi que par sa grossièreté), par ses interventions et aides (quoi que trop rares à mon goût), par la myriade de questions qu’elle vous posera sur un monde qu'elle n'a pas connu et que le héros ne revivra probablement jamais.

Le gameplay ? Pas extraordinaire, mais globalement maitrisé. Véritable jeu d'infiltration, chaque ressource doit être utilisé avec parcimonie. Le moindre adversaire armé ou infecté doit être approché avec grande prudence (même si on retrouve encore le colosse-super-blindé-où-faut-deux-bombes-atomiques-pour-le-neutraliser). Se faufiler entre plusieurs “mushroom-man” avec le stress de faire le moindre faux pas est un moment de tension qui vont feront rappeler que la moindre morsure est fatale. L'antithèse même d'un Uncharted, ou neutraliser un ennemi par surprise ne prend pas une demi-seconde.

Après plus d’une dizaine d’heures de jeu, je sens le sans-faute. À part une Ellie qui n’a pas peur de courir à côté des claqueurs, une IA adverse bancale, le jeu me balance dans la tronche tout ce qu’on peut faire de mieux pour m'immerger dans le monde, dans la narration. Le premier mot qui m’était venu à l’esprit au vu de la présentation était “Perfection”.
Malgré tout, tout au long du jeu, je ne peux m'empêcher d’être dans l’attente. Dans l’attente de voir ce qui peut générer autant d'enthousiasme autour du jeu. Car après tout, quand on a un jeu qui ne se ramasse que des notes quasi-maximales, on est dans le droit d’attendre un jeu parfait, non ? Et sur de nombreux points, The Last Of Us y parvient sans difficulté.

Bah nan, pas moyen. Après avoir fini le jeu, même après avoir vécu de (très) bons moments, je reste sur ma faim. Pourquoi je n’arrive pas à crier “BEST GAME EVAAAAAAA” ? Pourquoi ?!

C’est en faisant un état des lieux de mon ressenti sur le jeu que je me suis rendu compte d’une chose : le jeu ne m’a jamais surpris. À aucun moment, je me suis dit “Woah...” (sauf face à l’IA). À de trop rares moments, je n’ai senti une vraie montée en intensité ou en intérêt durant mes parties. Quand j’essaie de me rappeler d’un moment fort du jeu, je ne me rappelle de rien. Le niveau de (bonne) qualité me paraissait tellement constant qu’aucun moment n’arrive à se démarquer du lot dans ma tête (sauf peut être en hiver où j’ai commencé à être pris dedans). Ok, l’écriture des dialogues est maîtrisée. Ok, les décors flattent la rétine (quoi que du 720p sur mon écran 1080p, c’est dommage que ça pixélise au vu de la beauté des décors, mais rien de grave). Ok, y a des situations bien sympas (sauf pour Ellie et Joel). Mais ça reste quelque chose de continu, que l’on vit tout au long de l’aventure et qui devient presque “normal” (sans aller jusqu’à employer le terme “banal”). À aucun moment, je me dirai “Oh la vache cette ligne de dialogue est supra bien écrite”. L’aventure que j’ai vécu au final me paraissait à l’image de la route que doivent traverser nos héros : longue, assez lente par moment (au niveau du rythme), parsemée de situations plus ou moins tendues (peut être pas assez tendues à mon goût)...mais rien qui me surprenne ou qui puisse m’empêcher d’avoir espoir d’en voir le bout.

C’est un constat triste à dire, certains ne seront peut être pas d’accord. En tout cas, c’est le sentiment que j’ai après avoir fini le jeu. Est ce un retour de “hype” en pleine tronche ? Peut être. Est ce que j’aurais plus adoré le jeu sans avoir vu tous ces retours emballés sur le jeu ? Surement (et pourtant, je n’ai pas lu les tests, juste vu les notes pour éviter tout spoil et garantir un minimum de surprise).
Est ce un bon jeu malgré tout ? Je serai hypocrite de dire “Non”. Objectivement, c’est une très bonne aventure, un bon jeu (seulement “bon”, car je trouve le gameplay bon, mais pas à la hauteur du reste)... Bref une épopée qui mérite le coût d’être vécu. Mais de là à ce que je le considère comme le jeu de cette année ou de cette génération, il ne faudra malheureusement pas compter sur moi.