Hollywood ne fait pas rêver que les jeunes premières en quête de gloire. Depuis ses plus jeunes années, le jeu vidéo lorgne avec envie le septième art, son grand frère dans l'industrie du divertissement. S'il a aujourd'hui dépassé son aîné sur l'échelle comptable, il nourrit encore de vifs complexes sur sa capacité à susciter un degré similaire d'émotion et d'empathie. Mais l'exercice est casse-cou, et un développeur a tôt fait de se brûler les ailes en transformant le joueur en spectateur passif d'une œuvre vaguement interactive qui lui retire tout contrôle lors des événements majeurs.

Naughty Dog ne fait pas mystère de ses ambitions cinématographiques. Les trois épisodes d'Uncharted qu'il a développés piochent allègrement dans les codes du septième art, dont la science du grand spectacle demeure sans pareil. Avec The Last of Us, le studio voit plus grand et s'aventure vers cette frontière ténue entre cinéma et jeu vidéo, y évoluant tel un funambule sans jamais ou presque poser un pied de l'autre côté.

Porté par sa connaissance quasi-encyclopédique de la PlayStation 3, Naughty Dog parvient à décrire avec maestria une Amérique perdue, désespérément figée en 2013 par une catastrophe aux allures de lente apocalypse. Parmi ses inspirations, l'influence de La Route,The Walking Dead ou Je suis une légende est palpable. Grâce à un moteur graphique de grande qualité - quelques bugs mineurs mis à part - ainsi qu'une direction artistique et musicale impeccable, The Last of Us gagne son pari: il propose un univers si crédible que son état de désolation saisit immanquablement le joueur.

Mais The Last of Us n'est pas vraiment l'histoire d'un monde à la dérive; c'est avant tout celle de deux personnages complexes, Joel et Ellie, dont les rapports évoluent sensiblement tandis qu'ils tutoient chaque jour la mort pour traverser l'Amérique.

(…)

S'il n'était que la somme de ses parties, The Last of Us serait déjà l'un des jeux majeurs de la Playstation 3. Mais à le voir tutoyer l'excellence pendant quinze heures sans aucune baisse de régime ni de qualité, on n'hésitera pas à le placer parmi les jeux emblématiques de sa génération. Si, prisonnier de son classicisme et de ses ambitions cinématographiques, il ne fait pas avancer le jeu vidéo en tant que genre, il représente à l'heure actuelle ce qui se fait de mieux dans l'industrie.
ignis
9
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le 21 juin 2013

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