Il est des jeux dont on se dit qu'ils auraient été fantastiques il y a une demi-douzaine d'années. The Technomancer est de ceux-là. Si vous voulez un jeu à la pointe de la technologie, avec des animations magnifiques et des cutscenes à couper le souffle...Voyagez dans le temps, oubliez tout ce que vous savez de ces dernières années vidéoludiques, et mettez The Technomancer. Autrement, vous risquez d'être déçus.
L'histoire se déroule sur une planète Mars livrée à elle-même, en pénurie d'eau, contrôlée par de grandes compagnies et dont certains habitants exposés aux radiations solaires commencent à muter et sont rejetés par le reste de la population. On incarne Zachariah Mancer, un beau jeune homme – on peut personnaliser son visage donc, bon, normalement vous le trouverez beau – qui aime errer dans les rues avec un balai dans le cul. A moins que ce ne soit son bâton qu'il range à cet endroit puisque dès qu'il se retrouve en combat, Zach gagne en agilité et en souplesse. C'est aussi quelqu'un d'extraordinairement bavard, on a du mal à croire qu'il soit une sorte de soldat d'élite tant il lui arrive de bavasser – on dirait moi. Au fil de son aventure, Zach découvrira que le monde qui l'entoure et qui est le seul qu'il a pu connaître n'est peut-être pas aussi chouette qu'il a pu le croire. Il perdra en naïveté et gagnera en charisme, enfin, quand l'acteur qui le double ne met pas des intonations sorties du même endroit que le bâton.
RPG oblige, on dispose de divers points de talent, de compétences et de caractéristiques du personnage qui permettent de se faire un Zach aux petits oignons que l'on soit un sadique aimant électrocuter à tout va – c'est joli, ça scintille – un technicien hors pair assommant ses ennemis en deux coups de bâton, un combattant agile préférant les petits coups de couteau vicieux, ou un tank se protégeant avec son bouclier. Ce qui est intéressant, c'est que même si l'on se spécialise dans un style de combat, il est toujours possible de passer de l'un à l'autre pour se sortir d'une situation périlleuse. Dommage que ce système de combat soit parfaitement adapté à un environnement ouvert quand on passe la majeure partie de son temps dans des couloirs. On s'en sort, mais c'est parfois poussif. Je ne suis pas une reine de la technique et j'ai l'habitude de mourir et recommencer mais j'ai parfois dû faire face à des morts à la con, quand une petite pirouette d'esquive m'a coincée dans un container, un portail, un mur, un mur invisible...Ce qui a permis à trois ennemis de m'achever en deux coups de cuillère à pot. Oui parce que, même quand on joue en normal, il ne vaut mieux pas se faire frapper plus de deux ou trois fois si on tient à la vie.
Sorti du combat, certaines compétences permettent d'augmenter le charisme de Zach pour avoir plus d'options de dialogue - ou plus de chances de succès – ses capacités techniques pour pouvoir crafter ou sa faculté à ouvrir des serrures... Cela permet souvent de trouver une manière différente de se sortir d'une situation, de résoudre une quête...
En parlant de quête, l'histoire principale est intéressante et bien construite, pas forcément surprenante mais elle a le mérite d'être travaillée. Que ce soit dans cette histoire ou dans les missions annexes, on se retrouve face à des choix qui ne seront pas sans conséquences, plus ou moins grandes. Outre le système de réputation – envers les factions et les compagnons – qui varie en fonction de nos décisions, on constate aussi parfois, un ou deux actes plus tard, ce qui est arrivé à un personnage que l'on a rencontré au début du jeu. C'est toujours agréable – enfin pour le côté narratif, parce que certains, je m'en serais passée, snif. Même si Zach devient rapidement un personnage important – la fameuse histoire du mec qui part d'en bas et qui grimpe, parce qu'il est exceptionnel, tout ça – il n'est pas présenté comme le sauveteur de l'humanité et cherchera principalement à sauver ses fesses et celles des siens. En chemin, on se mêlera d'affaires plus grosses, principalement pour se débarrasser du grand méchant. Grand méchant qui, une fois qu'on le confronte, se contente d'un beau "c'est moi le méchant" et est éclipsé de manière un peu frustrante. Enfin la conclusion, pas totalement mauvaise mais loin de l'optimisme niais que l'on rencontre parfois est partiellement attendue mais pas moins agréable.
L'univers est riche, sans plus. On sent qu'il est travaillé, les décors sont beaux et différenciés les uns des autres, on ne risque pas de confondre deux lieux dans lesquels ont s'est retrouvé à errer. Heureusement, cela dit, car ces lieux ne sont pas si nombreux et l'on est amené à les explorer à de nombreuses reprises. Les allers-retours font partie du quotidien de Zach qui devrait s'inscrire au Mars-rathon tant il court dans tous les sens. Comme le jeu n'est pas très long, on n'a pas trop le temps de s'en lasser. Surtout qu'avec mon sens de l'orientation hors du commun, je mets toujours du temps à retrouver mon chemin au début, donc j'ai toujours l'impression d'atterrir à un nouvel endroit – croyez-le ou non dans la vraie vie je retrouve toujours ma route, sauf dans les centres commerciaux. Peut-être que l'environnement « intérieur » du jeu m'a donc désorientée de la même manière qu'un temple de la consommation. Sans entrer dans les détails, la deuxième partie du jeu nous amène à explorer certains lieux que l'on a déjà vus mais d'une autre manière, cela oblige à changer ses repères et c'est assez intéressant.
Dommage par contre que le contexte du jeu ne soit pas plus développé. On peut demander leur avis à un certain nombre de personnages sur les lieux et les autres gens, ce qui est assez intéressant parce qu'ils n'ont pas tous le même point de vue, mais cela reste assez limité. On en sait juste assez pour comprendre comment on en est arrivé à ce monde dirigé par les grandes entreprises de gestion de l'eau.
Zach est donc amené à rencontrer des gens, et à les saouler profondément avec ses discours argumentatifs pas toujours efficaces – je pense que quand les gens lui cèdent c'est juste pour qu'il arrête de parler. En même temps, un des mentors de Zach est un vieux scientifique un peu frappé qui déblatère des trucs incompréhensibles à longueur de mission, pendant qu'il vous suit gaiement. D'une manière générale, les compagnons sont bien écrits mais pas assez fouillés. Certains ont plus de profondeur que les autres, certains ont un passé commun que l'on découvre en les aidant à résoudre leurs petits soucis. C'est pour une partie d'entre eux le moyen d'en apprendre plus sur leur passé, puisque autrement la seule option de conversation avec eux est de leur demander leur avis sur telle personne ou tel endroit.
Il y a des possibilités de romance – youpi, la fille que je suis adore les histoires romantiques, surtout au milieu du chaos, c'est tellement plus émouvant quand on se dit je t'aime avant d'aller mourir...En même temps au moins ça n'engage à rien, sauf si on finit par survivre...Et meeerde ! - mais ne vous emballez pas, pas de drague en douze actes. Une fille – un garçon – vous plaît, dites lui que vous la trouvez cool, aidez-là à faire ses trucs et elle vous sautera plus ou moins dessus sans autre forme de procès. Ou alors je suis tombée sur la romance la plus simple du jeu, comme je suis monogame je n'ai pas tout testé. On a alors droit à une magnifique scène d'amour où l'on voit deux playmobils tenter vaguement d'attraper une araignée sur un lit – ah non, c'est pas ça qu'il font ? Tiens j'aurais juré que – puis on peut choisir de larguer sauvagement l'objet de nos désirs ou lui faire une grande déclaration d'amour en dix paragraphes. Youpi, je suis en couple, je peux joyeusement continuer à faire mon Mars-rathon sans que rien ne change vraiment.
The Technomancer est donc un bon jeu si l'on occulte le retard graphique et que l'on est patient avec le système de combat. Je le recommande vivement aux amateurs de RPG orienté action, la longueur raisonnable – une vingtaine d'heures - permet de se plonger dans l'histoire et l'univers avec bienveillance sans avoir le temps d'être – trop – saoulé par ses défauts.