Il y a quinze jour, je m'enfermais dans une salle de cinéma pour aller voir Fast & Furious 9. Après 2h30 de scènes d'actions trop longues et de dialogues trop bêtes, je ressortais de la salle convaincu que le blockbuster américain avait été irrémédiablement déclassé dans la hiérarchie du divertissement, en termes de spectacle comme en termes d'émotions.
Quinze jour après cette désagréable (quoiqu'éclairante) expérience, je me retrouve en possession de 12 Minutes, un jeu que j'attendais depuis sa première apparition à l'E3 2018.
Twelve Minutes est l'exact antipode de F&F9. Compact, dans son univers (un deux-pièces avec salle de bain), son casting vocal (Daisy Ridley, James McAvoy et Wilhem Dafoe, excusez du peu) et sa durée de vie (5 heures pour moi), 12 minutes est parvenu à me plonger dans un délicieux état de concentration et d'excitation tout au long de son intrigue simple mais efficace.
Se présentant comme un point & click sans fioriture, 12 minutes raconte la curieuse soirée d'un couple de jeunes urbains perturbé dans sa routine par l'irruption d'un policier vindicatif dans leur appartement. Coincé dans une boucle temporelle, le personnage principal (vous), devra user de toutes les ressources à sa disposition pour briser ce cercle infernal.
Le vrai tour de force du soft : nous questionner sur ce que nous serions prêts à faire pour échapper à une situation désespérée et désespérante, à travers les ramifications d'interactions que son système narratif propose. Pour ne rien gâcher, une moquette toute "Kubrickienne" et un unique plan zénithal tout "Fincherien" viendront immédiatement placer le joueur dans une ambiance aussi familière que dérangeante. La musique, quand à elle, m'aura beaucoup rappelé The Return of The Obra Dinn.
Le parti pris par les développeurs de ne pas permettre au joueur de rejouer l'histoire sur l'unique sauvegarde disponible à la fin du jeu vient parfaitement conclure un récit construit sur les thèmes du refoulement et de l'acceptation. Dans l'appartement vide, il n'y a plus rien à faire, et c'est très bien ainsi; on peut, nous aussi, passer à autre chose.
Seul bémol notable de mon point de vue : le prix, au regard de la duré du soft. Si je ne regrette pas d'avoir payé 20€ day one, cinq heures de jeu pour une telle somme peuvent paraître un peu légères, lorsqu'un Hadès vous en offrira probablement entre 50 et 3000 pour le même prix. Mais après tout, il faut bien rémunérer le travail des artistes. Vin Diesel devrait en prendre de la graine.
DEUXIEME PARTIE
Bien aidé par Asornod et Tipeton, je retourne donc dans l'appartement, et effectivement, un petit détail m'avait échappé.
Le Soft propose bien une "seconde fin", la "vraie" fin, portant pour moi l'expérience à 6h au lieu de 5. Problème, cette nouvelle fin crée plus de problèmes qu'elle n'en résout, et vient quelque peu échouer le scénario sur les écueils propres aux sauts dans le temps, retours vers le futur et autres boucles.
Pour autant, cette nouvelle fin ne vient pas remettre en cause fondamentalement les thèmes du jeu, ni la qualité de l'expérience. Au pire, elle semble légèrement superflue, mais propose une alternative dépourvue de souffrance pour chacun des personnages impliquée. Ironiquement, alors que la "première" fin offrait la délivrance par l'acceptation, c'est bien le refoulement qui apparait comme la solution ultime.