Essayons d'aller à l'essentiel. Ce jeu pue la merde et il pue la merde pour deux raisons. Il pue la merde parce qu'il fait des choix de gameplay douteux et il pue la merde plus globalement en tant qu'œuvre dont l'histoire semble avoir été rédigé par un adolescent émo qui tente de se donner un semblant d'identité en dressant un portrait inutilement et bêtement sombre du sens de la vie.


Déjà le gameplay. D'habitude, je ne suis pas un grand fan des mondes ouverts et je trouve que beaucoup de jeux adoptant cette structure aurait grandement gagné à être plus linéaires. Ici c'est l'inverse. On est face à un train de la mine qui aurait été beaucoup plus cohérent dans son expérience s'il avait adopté une structure semi-ouverte à la manière d'un Return of the Obra Dinn. Pourquoi ? Parce qu'on est dans les bottes d'une femme qui tente (j'imagine) de comprendre un peu mieux qui elle est et sa place dans le monde en faisant la lumière sur un héritage familial compliqué.


On comprend que la famille Finch semble être frappée d'une malédiction qui amène chacun des membres à mourir dans des circonstances aussi créatives que tragiques. De la même manière que dans le jeu de Lucas Pope on incarne une experte en assurance qui doit démêler les sombres histoires qui hantent un bateau à la dérive, ici le personnage doit se plonger dans les souvenirs des membres de sa famille et les coller les uns aux autres pour mieux comprendre le tableau familial qui en ressort.


En ce sens, il aurait été intéressant de nous laisser nous perdre dans la gigantesque maison qui se veut un personnage du jeu à part entière et en fouiller les moindres recoins pour essayer façon puzzle de trouver un accès aux chambres des membres de notre famille reconverties en mausolées. Il aurait été intéressant de laisser le joueur et donc la protagoniste trouver les souvenirs dans l'ordre qu'il/elle souhaite quitte à ce que cet ordre le perde au premier abord et l'empêche de tout comprendre.


Mais non, What remains of Edith Finch est obsédé par le contrôle et nous fait trouver les mémoires dans l'ordre qu'il a décidé lui. Vers la fin du jeu on découvre la scène où une dispute entre la mère et la grand-mère de notre avatar amène au moment où l'on quitte les lieux pour nous amener à aujourd'hui. En tant que jeu, il aurait été intéressant d'avoir la possibilité d'accéder à ce souvenir à n'importe quel moment du jeu et qu'il nous fasse plus ou moins sens selon l'avancé dans notre enquête et donc selon selon notre compréhension de la situation. Mais non, le jeu dicte ce qu'on doit voir quand il a décidé qu'on le verrait. Du coup ludiquement, il y a une vraie fracture entre l'héroïne qui se perd dans les méandres d'une demeure labyrinthique à la recherche de son passé et le joueur qui est juste passivement assis sur un escalator.


Mais les problèmes ne s'arrêtent pas là. L'œuvre ne pèche pas seulement ludiquement, elle pèche aussi dans son propos de manière plus générale. Il y a une vraie impression de gratuité quand on termine le jeu. Comme si celui qui avait rédigé le script l’avait fait larmoyant tout en se masturbant la tête en bas devant une glace et en se disant “Je vais faire pleurer les gens en leur montrant des choses vachement tristes parce que la vie c’est nulle”. Ok, mais après ? Parce que là comme ça, ça sonne vachement creux. La vie n’a pas forcément de sens en soi c’est sûr, mais on ne peut pas dire qu’on a affaire à un jeu naturaliste. Chaque souvenir nous montre quand même des gens qui meurent dans des circonstances beaucoup trop absurdes pour qu’on ait l’impression d’avoir affaire au réel.


Du coup on se dit que tout ça cache un secret, un message. On se dit qu’on a affaire à un conte initiatique qui traite des problèmes qu’engendre les non-dits ou je sais pas quoi (honnêtement j’ai oublié), et que c’est parce que à l’image de cette maison qui est un joyeux bordel dans lequel on est venu essayer de mettre un peu d’ordre, on va essayer de comprendre c’est quoi le souci des Finch, on va pouvoir ne pas répéter les erreurs de nos ancêtres et donc nous sortir de la fatalité liée à notre nom.


Mais non.


Le jeu décide de s’arrêter au moment où l’intrigue commençait à démarrer. D’un coup on apprend que la protagoniste est enceinte et au moment où elle commence à trouver des réponses sur pourquoi les gens comme elle clamsent les uns après les autres, hop, elle clamse à son tour et du coup ouin ouin c’est triste. Alors ok, question : C’est quoi le projet ? Parce que dans la vraie vie personne crève mystérieusement parce qu’il a eu le malheur de s’appeler Dupont. Donc du coup tu vas chercher une idée saugrenue au fin fond de ton cône de dépressif qui visiblement adore se sculpter des code-barres sur les avant-bras, et après tu stoppes le jeu pour pouvoir t’épargner d’avoir à justifier ta démarche ? Est-ce que c’est pas un peu trop facile ? Parce que là du coup le résultat c’est que j’ai juste l’impression que les moments de tristesse forcée qu’on m’a chargé dans la gueule était une finalité plutôt que l’outil d’un propos. Et au final ça fait que tout ça sonne creux. Dommage quand même non ?


Tout cela est dommage, parce que le jeu a mine de rien de vraies propositions. Que ce soit quand on fait défiler du texte avec un cerf-volant ou quand (et c'est probablement le meilleur moment du jeu) un mec s'invente une vie dans sa tête pour oublier qu'il est dans une usine à faire la même tâche en boucle. Mais en fait c'est ça le problème du jeu. C'est que ce n'est pas un jeu, c'est un ensemble de moments. On a pensé à des moments qui sont cools et maintenant qu'on a plein de moments cools, on va les assembler maladroitement et recouvrir les traces de mauvais ciment avec du vernie arty et les gens n'y verront que du feu. Si ça marche sur certains, tant mieux, pour ma part ce mur en placo m'a juste laissé de marbre.


Panineohm
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le 11 janv. 2023

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Panineohm

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