Les cinquante premières pages, j'ai regretté avoir commencé ce livre, barbare, mal dégrossi, brutal, me sentant dupée par les bonnes notes et critiques de mes éclaireurs sur SensCritique. Finalement, le livre achevé, j'imagine que par son écriture âpre et austère l'auteur a voulu rendre la violence réelle de différents milieux, celui du réseau criminel du narcotrafic bien sûr, avec ses torrents de sang versés, ses tortures, sa panoplie impressionnante d'armes, mais aussi celui, peut-être plus lâche et pernicieux, auquel est exposé un pauvre bougre d'origine étrangère.
Nous sommes directement plongés au cœur de l'action dans la cambrousse du Tarn-et-Garonne, témoins malgré nous du meurtre de trois Latino-américains. A côté de nous, un vieux pedzouille vandale et raciste, n'en croit pas ses yeux et dégouline de terreur. Nous suivrons le tueur, un motard, tout au long du livre, tout comme les gendarmes de Castelsarrasin et les hommes de main dépêchés par le père d'un des trois trafiquants assassinés.
Finalement, ce n'était pas une lecture si détestable, et DOA a pour mérite certain de dénoncer la saleté, la crasse, l'abjection du commerce de drogue.
« - Des traficantes ? Oui. Les trois premiers morts viennent de chez moi. Des hommes très intelligents, cinicos, qui ont compris le monde et qui lui vendent sa droga. »
Michèle Massé du Réaux n'aima pas le ton de leur invité. « A vous entendre, on dirait que vous regrettez presque ce qui leur est arrivé.
- Ils jouent, ils perdent. Au moins, ils jouent.
- Drôle de conception, pour un représentant de la loi.
- Sans eux, nous ne pourrions pas jouer non plus. » Barrera sourit et but un peu de vin.
« - Ce n'est pas un jeu, ces gens sont des brutes.
- Non, plus que des brutes. S'ils sont juste violents, pour nous c'est plus simple, no ? Mais ils ont le pouvoir, partout. Ils sont comme les multinationales. Ils emploient des milliers de gens qui sont prêts à tout pour les dollars, parce que c'est le seul choix pour vivre. Ou parce que c'est facile. Les narcos ils ont compris, ils profitent. Ils paient mal, Ils ne donnent pas la seguridad social et personne ne peut se plaindre, il n'y a pas les syndicats. Plomo o plata, ils disent là-bas, du plomb ou de l'argent, c'est tout.
- La loi du plus fort.
- Si, le capitalisme puro. Ils ont une chose là-bas. Nous, nous la voulons ici. A tout prix. Ils nous montrent juste ce que nous valons.
- Nous ? Je ne vois pas en quoi nous...
- Les deux cents milliards de dollars de la cocaina, par année, il faut des gens pour les payer. Et qui peut payer ? Nosotros. Chaque fois que quelqu'un achète sa cocaina ici, il paie les cartels. Il est responsable de mas violencia, mas miseria ailleurs. Les drogués, ils ne tuent pas, ils ne pillent pas, ils ne polluent pas tout, ils font pire, ils consomment. Pour le plaisir ou pas, ce n'est pas le problème, personne ne les pousse, ils consomment et ils ne veulent pas voir. Les narcos, ils grandissent grâce à ça. A cause de ça, à cause de nous. Nous laissons faire. La cocaina, c'est cool. »
(pages 137 – 138 )
Peinture
• La mort de Pablo Escobar ~ Botero
L'article « La passion selon Botero » sur le blog Pensées sur la planète, Journal de Pierre Bayle, libre et solidaire dans un monde indifférent est très intéressant.
• La Question ~ R. Matta, qui renvoie au livre La Question d'Henri Alleg.
• Sans Titre I ~ Luis Caballero
• Géométrie colombienne ~ Omar Rayo
• Lieto fine di un martire ~ Nicola Samori
Musique
Sicarios ~ Ruben Blades
Dead Souls ~ Joy Division
O Sicario E O Padre ~ Lando Chill
Violence Does Even Justice ~ Leng Tch'e