Hassan I Sahba est un homme bien singulier, imaginez un Savonarole musulman avec l'esprit tordu de Charles Manson. Le groupe de rock psychédélique Hawkwind avait bien capturé son aura mythique dans leur morceau éponyme. fondateur et le chef de la secte ismaélienne des Nizârites, qui était une branche du chiisme ismaélien, connus pour leur approche ésotérique de l'islam et leur interprétation particulière de la doctrine chiite.
De nombreux détails vérifiables sur la vie, la pensée et les activités du fondateur de la secte redoutée des Hashshashin (Assassins) sont documentés par des chroniqueurs turcs, arabes, persans et croisés, souvent témoins des actes et paroles du Vieux de la Montagne, contribuant à forger l'une des figures les plus fascinantes de l'histoire politique, religieuse et militaire du Moyen Orient. Les mystères et légendes qui l'ont entouré longtemps après sa mort ont inspiré de nombreux récits romancés, parmi lesquels Alamut, de l'écrivain slovène Vladimir Bartol, qui demeure particulièrement captivant.
Hassan naît à Qum, en Perse, dans une famille ismaélienne aisée et respectée. Après avoir déménagé à Rey et poursuivi ses études à l'université de Nichapour entre 1070 et 1074, il devient bibliothécaire pour le sultan seldjoukide Malik Chah en 1075. De plus en plus opposé à la domination turque, il fuit Ispahan en 1077 et prête serment de fidélité à l'imam fatimide en Égypte. Sa fuite le mène à travers le Moyen-Orient, de la Perse à la Syrie, jusqu'à la province iranienne du Dailam. Là, il gagne en renommée en tant qu'orateur charismatique et idéologue d'une foi chiite rigoriste, tout en rejetant les dominations arabe et turque. Hassan établit finalement sa base à Damghan et s'empare de la forteresse d'Alamut ou Aluh Amut (soit "la leçon de l'aigle" en dailamite) en 1090, où il érige un puissant bastion pour réaliser ses ambitions militaires et politiques.
Hassan met en place un code strict à Alamut, l'école fedayin, exigeant une obéissance totale, un mode de vie austère et une organisation hiérarchique rigide. Pour prouver sa rigueur, il fait exécuter ses propres fils, accusés de rébellion. En parallèle, il sélectionne des centaines de jeunes ismaéliens pour former une élite de guerriers, soumis à un entraînement rigoureux. Surtout, il cultive du haschisch, utilisé pour droguer ses guerriers avant les missions. Plongés dans un décor paradisiaque, ces hommes croient avoir goûté au paradis promis par le Coran, devenant ainsi obnubilés et soumis à leur guide. Grâce à la forteresse inexpugnable d'Alamut et à cette armée de fanatiques, Hassan parvient à défier l'empire dominant de l'époque par le biais d'assassinats ciblés, réalisés avec un professionnalisme redoutable et dévastateur.
Ce récit passionnant est servi par une prose poétique et envoutante dont l'immersion nous plonge véritablement à l'époque de l'islam médiéval. Etant donné que le livre de Vladimir Bartol fut écrit dans l'entre deux-guerres européen, il semble évident que la métaphore est destinée aux totalitarismes émergeants, l'auteur parvient donc à tisser habilement des éléments historiques avec des éléments de fiction, que ce soit pour Hassan Sahba comme pour l'Europe des années 1930. Il soulève des questions importantes sur le pouvoir, la manipulation et la nature de la croyance religieuse. À travers l'histoire de Hassan-i Sabbah et de sa secte des Nizârites, on y explore les dangers du fanatisme religieux et les conséquences dévastatrices de l'endoctrinement et de la manipulation sur les individus et sur la société dans son ensemble.