American Psycho est un livre difficile à lire, il en est même éprouvant. Il vous met si bien dans la tête d'un psychopathe, que ça en devient destabilisant. La structure est donc décousue en sens dessus-dessous (comme ses horribles meurtres).



Tout est décrit d'une froideur et d'une neutralité impassible et indifférente sans nom. C'est profondément cynique.


Au début on pourrait croire à une vaste blague. Il ne se passe rien, on assiste à d'infatiguable descriptions de tout et de n'importe quoi (nouvelles technologies, vêtements, plats des restaurants, accessoires divers, habitations, la rue...), accompagnés de longs échanges où tout le monde a son mot à dire en se coupant la parole. Cette alternance entre monologue et dialogue se fera de la 1ère à la dernière page. Après tout nous sommes dans un PDV interne du héros, ou plutôt clairement anti-héros.


Personne ne se respecte, tout le monde veut exister. Dans cette course frénétique à la recherche du bonheur, même au sommet, on veut encore décrocher les étoiles. Tout le monde copie tout le monde par ce mimétisme poussé à l'extrême, à tel point que tout le monde se confond.


Plus rien n'est sûr, tout s'efface, les émotions s'effacent.


La folie du consumérisme va progressivement et détruit tout sur son passage, n'ayant de pitié pour personnes (y compris les pauvres excluent que ces riches en constance concurrence). Cette vaine existence sans but n'a aucun sens.


Le dénommé Patrick Bateman, semble au premier abords absent à cette univers sans état d'âme. Un idéaliste qui n'a pas sa place parmis les autres tous et toutes autant détestables par leur superficialité qui les font sentir supérieures. Il est donc aisé d'être sexiste, raciste et homophobe.


Seulement par ces incessantes name dropping (littéralement le « lâcher de noms »), Patrick parle par cette figure de style consistant à citer des noms connus, notamment de personnes ou d'institutions, pour tenter d'impressionner, selon le cas, ses interlocuteurs, afin de donner du sens à son existence chaotique.


Étalage de titres, ou de marques commerciales ; faire étalage de ses relations. Se servir de la magie qui émane du nom de célébrités pour asseoir sa propre supériorité tout en amenant son voisin à prendre conscience de la terne existence qu'il mène. Le name dropping est une composante du snobisme et l'une des missions du snob est d'encourager chez autrui un sentiment, même vague, d'inutilité. Ce procédé a souvent une connotation péjorative ou sarcastique car il est perçu comme la tentative d'impressionner les interlocuteurs. S'il est utilisé dans un raisonnement logique, le name dropping peut être considéré comme un argument d'autorité.


Patrick est donc le pire de tous. Et il faut attendre plus d'une centaine de pages, pour qu'enfin on le découvre sous son vrai visage terrifant. Que cette vaste blague n'en est pas une, ou alors peut-être que si. Si ça se trouve c'était bien une horrible plaisanterie morbide à l'humour noir où l'on est plus incapable de distinguer le vrai du faux. Cette vie à de quoi faire rire sous l'humour froid de chacun, seul trace d'humanité dans un monde déshumanisé.

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le 20 nov. 2022

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