Edouard Levé a surgi dans ma petite vie tranquille par la voie inhabituelle des ondes radiophoniques. Ayant pris au vol une émission sur France Inter, j'écoutais ce que je croyais être la chronique d'une journaliste qui lisait en fait des extraits d'Autoportrait.
J'ai instantanément été hameçonnée. Avec une sorte d'urgence, je suis partie à la découverte de cet auteur inconnu en bénissant mon index d'avoir allumé l'autoradio.
Autoportrait est une merveille littéraire non-identifiée. Elle prend à contre-pied toutes les réserves que l'on pourrait d'emblée formuler à son égard. Non, il ne s'agit pas d'un simple exercice de style à la Raymond Queneau. Non, il n'y a rien d'assommant à parcourir des lignes dont la plupart commence par "je".
Autoportrait a une qualité intime et incantatoire stupéfiante. Elle palpite d'une vérité toute simple sur le vivant qui n'est jamais qu'une succession de trivialités et de grandiose en proportion aléatoire. Bien loin d'observer un homme qui fouille les moindres replis de son nombril, on a le sentiment que l'auteur tisse au fur et à mesure mille dialogues secrets avec chacun de ses lecteurs. Au lieu d'être à sens unique, l'oeuvre s'amplifie du propre écho de tous ceux/celles qui la visite.
Je ne pense pas avoir jamais lu quelque chose qui se situe aussi justement au carrefour du singulier et de l'universel.
Reste le voile de tristesse, la gorge légèrement nouée qui accompagne forcément cette rencontre et cette exploration d'un être qui a choisi de se taire à jamais.
Plongez tête première dans Autoportrait. Vous irez un peu aussi à la rencontre de vous-même grâce au talent d'un auteur qui vous fait croire qu'il ne s'agit que de lui.
Amitiés,
Dustinette