Il est difficile de formuler une critique unie de ce livre remarquable mais disparate.
La première partie (essentiellement de la satire sociale) est très féroce—mais, contrairement à celle d’autres auteurs, elle a un côté jubilatoire dans la mesure où l’auteur regarde nettement de haut ses personnages qui s’agitent. Le deuxième volet est composé par un monologue d’une petite centaine de page, véritable traité sur l’amour (ou le désir ?) Cette première moitié (peu ou prou) m'a semblé infiniment séduisante.
Les troisième et quatrième volets, l’histoire d’amour à proprement parler (ce qui est paradoxal — même s'il est vrai que Cohen disait écrire un roman sur l'amour, et non un roman d'amour), m’ont moins convaincu. Les envolées lyriques (inspirées du Cantique des cantiques ?) sur leur romance naissante, sont belles mais lassantes ; Cohen aime en général bien retourner ses sujets dans tous les sens, avec un style un peu cyclique, ce qui me semble plus tolérable pour les idées que pour les sensations. La dernière partie est intelligente, mais un peu miteuse ; le style puissant de l’auteur semble encalminé dans sa peinture de la décrépitude (malgré de belles envolées).