L'idée est d'analyser et de mettre à nu ce qui se cache derrière certains mots et certaines expressions très en vogue dans les mondes médiatique, politique et de l'entreprise. Il y en a comme ça une quarantaine, qui font chacun l'objet d'un texte de deux à quatre pages. Par exemple, écosystème, transclasse, confort (sortir de sa zone de), résilience, j'assume, algorithmes, transition. Pour en donner un échantillon. Le court texte qui accompagne chacun de ces mots/expressions peut prendre des formes diverses : illustration par des personnages de fiction, narration d'une expérience personnelle de l'auteur ou encore commentaire de l'actualité. Voilà pour la forme.
Après, pour ce qui est du fond, l'idée est de démonter ces locutions qui sonnent si bien et que nous avons tous entendu à un moment ou à un autre. Non pas qu'elles seraient, selon Bégaudeau, totalement vides de sens ou, pire, qu'elles signifieraient l'inverse de ce que l'on croit entendre. Ce sont plutôt - d'où le titre de l'ouvrage - des boniments au sens où elles présentent quelque chose de désirable, mais dont la réalité complète n'est jamais évoquée. Sans surprise, la grille d'analyse est marxiste (qui sont les gagnants, en termes de profits économiques, et en corollaire les inévitables perdants) et penche également parfois du côté de l'ingénierie et du contrôle social. Le dernier chapitre, qui porte sur le mot novlangue, expose ainsi qu'il ne s'agit pas d'une novlangue, au sens orwellien, mais plutôt de termes ou d'expressions destinées à enjoliver la réalité crue des rapports sociaux dans une société capitaliste moderne.
C'est assez plaisant à lire, car c'est comme toujours bien écrit, dans une langue accessible, concrète et non dénuée d'un punch certain. Beaucoup de lucidité et des situations qui font indéniablement écho à la France de 2023. Une lecture qu'on ne peut que recommander, mais dont la diffusion sera probablement restreinte pour l'essentiel à des lecteurs déjà convaincus. Et ça ne touchera pas autant de monde que BFM TV et C News, loin s'en faut, alors que ça ouvrirait probablement l'esprit de certains de leurs téléspectateurs.