Catch-22 : un nom entendu pour la première fois voici maintenant une dizaine d’année. Porté aux nues par de nombreux camarades étudiants (souvent de ceux qui s’écoutaient beaucoup parler) quand j’étais à l’université, je n’avais jamais franchi le pas, mais avais gardé à l’esprit qu’un jour il faudrait quand même que je m’y attelle... C’est désormais chose faite.
Alors donc : quoi de spécial dans ce roman ? On y suit les aventures du capitaine Yossarian et de sa bande de collègues déjantés sur une base militaire de l’aviation américaine en Italie, lors de la reconquête du vieux continent pendant la seconde guerre mondiale. Ces officiers et sous-officiers sont tous complètement tapés. De gentils loufoques non menaçants à psychos fous-dangereux, on passe en revue des mecs qui auraient tous leur place en hôpital psy. On observe leurs interactions, entre eux et avec leurs chefs, ainsi que leurs visites successives à Rome en permission, à l’hôpital en convalescence, en Italie du Nord à bord de leurs bombardiers, ou encore dans les paysages boisés de l’île où se situe l’aérodrome.
Surtout, ils font face aux dysfonctionnement d’une armée sérieusement écorchée par Heller. L’auteur peint en effet une fresque vive et cruelle de la grande muette, entre absurdité de tous les instants, gradés inflexibles et carriéristes, et procédures généralement sans queue ni tête. Et donc au milieu de ce joyeux bordel, le Catch-22 : si un pilote demande à ne plus faire de missions parce qu’il est touché par des troubles mentaux, il ne peut pas être dispensé de missions, puisque quelqu’un qui demande à éviter les horreurs des missions de bombardements ne peut être que sain mentalement…
De ces dysfonctionnements, Heller tire le rire au lecteur. Beaucoup de passages assez drôles, pas forcément à s’en taper sur les cuisses, mais qui génèrent un sourire sur les lèvres pendant la lecture à cause de l’absurdité de toutes ces situations burlesques qui se succèdent. Malheureusement, le soufflé retombe assez vite. Deux chefs d’inculpation majeurs selon moi. D’abord, c’est trop long. Beaucoup de monotonie et de redite. Ensuite, l’intrigue est quasi absente. Pour un roman, cela peut parfois fonctionner, mais le sujet doit être plus épais, plus dense, sinon, on s’ennuie vite… C’est le cas ici. Le message de Heller passe en 200 pages, pourquoi en écrire 550 ?
Restent quelques passages marquants, certains assez durs à lire aussi car très percutants. Au final, le livre n’est pas sans mérite, mais je pense que je l’ai lu trop tard. J’aurais sans doute dû le lire il y a 10 ans, quand j’étais encore jeune et révolté… Mais depuis, j’ai lu d’autres manifestes anti-guerre, et beaucoup étaient plus convaincants.