Ah, elle est terrible, cette guerre du futur où les nantis ont assis leur pouvoir et leur propagande, pourchassant les communautés de contrevenants qui se terrent dans les sous-sols, sous les gravats, dans des boyaux sordides pour survivre à leur idéologie égalitaire.
Oui, c'est terrible, regarde comme ça pue, un sous-humain, comme ça en est réduit à faire les poubelles, à arracher sa pitance aux mouettes, aux chiens et aux rats, regarde comme on a des visages déformés, comme on se fait salement torturer, comme on échoue dans nos tentatives révolutionnaires, comme, piteux et crasseux, on s'accroche à nos idéaux dans ce monde qui n'offre aucun espoir.
Lutz Bassmann, aka Antoine Volodine, délivre avec "Danse avec Nathan Golshem" une bonne grosse pièce (malgré le format court) de ce qu'il appelle le post-exotisme, "un objet poétique marginal et rien d'autre" d'une noirceur inextricable, où toute révolte est soldée par l'échec, où l'individu est broyé et seul dans un monde de mort.
Un objet poétique, certainement, avec une forme de martèlement de formules simples et supposément lourdes de sous-texte, des énumérations, des listes absurdes, tentant quelques notes d'humour dans un univers tellement étouffant que sourire paraît aberrant. Une histoire d'amour, aussi, morne et sans lumière, fatigante en réalité - oui, oh la la, Jennifer a traversé tant d'épreuves pour se recueillir sur la tombe de son mari Nathan, oh la la, elle danse jusqu'à saigner pour faire apparaître son fantôme, oh la la, c'est dur le deuil c'est dur la guerre c'est dur les souvenirs, regardons la mer sans un mot pendant des heures, le poids du monde pèse tellement sur nos pauvres épaules.
Bon, voilà, "Danse avec Nathan Golshem" m'a profondément agacée tant je l'ai trouvé geignard et sans nuance, allant toujours plus loin dans le glauque sans jamais réellement contextualiser la situation politique du roman, c'est donc à dire en ne s'attachant finalement qu'à une forme absolue de misère humaine sous ses multiples formes, y compris dans l'amour, le sexe, ou l'humour.
Ca se lit en fronçant les sourcils, avec une moue de dégoût. Ca te déprime quand ça ne t'ennuie pas. Donc bon, non.