Quel plaisir de retrouver l'écriture simple et sensible de Patti Smith que j'avais découverte avec Just Kids.
Cette nouvelle, moins personnelle et narrative, est néanmoins plus profonde et interrogative.
Cinquante pages introduisent (et d'autres clôturent) "Dévotion" narrant très curieusement le pourquoi, le comment et les inspirations contextuelles (la seconde guerre mondiale, Simone Weil, le patinage artistique…).
Que fait-on de notre destin de nos héritages, de nos dons et de nos rencontres? L'héroïne, Eugénia, est le reflet en symétrie sombre de la philosophe Simone Weil. Origines religieuses similaires, mêmes traumatismes de séparation et de déracinement guerriers, l'innocence et des capacités intellectuelles extra-ordinaires.
Mais Weil sacrifie littéralement sa vie à la "Dévotion", aux autres, sentant sa vie indigne devant le malheur des autres. Elle a tout donné, jusqu'à épuisement, de tout ce qu'elle était, et de tout ce qu'elle était devenu et reçu.
En miroir, Eugénia reçoit cette "Dévotion", de ses parents, de sa tante et de ses amants, de ses professeurs et de son amant. Elle sabote minutieusement tout ce qu'elle est et ce qu'elle a reçu. Et finit par se sentir "indigne de vivre". Elle se suicide en deux fois, à la mort d'Alexander qui la prive de sa raison d'être, puis en propre.
L'histoire en soi, bien qu'intrigante, a surtout le mérite des réflexions. On suit agréablement Patti Smith, toujours aussi authentique, dans son enthousiasme. Le style reste toujours le reflet de l'autrice, comme un sourire ornant familièrement son image.
Petite citation : Parfois je rêve que les loups pleurent.