Dieu, le temps, les hommes et les anges par Anaïs Alexandre

C'est l'histoire d'un village polonais, Antan, et de ses habitants. C'est un village plutôt paisible, un village où l'on né, où l'on souffre, où l'on aime et où l'on meurt. Dieu et les anges y descendent parfois. On suit l'existence de certains des villageois, on les voit grandir, se marier, avoir des enfants. On partage leur émotions. Et vient la guerre. Elle traverse leur existence en apportant son lot d'horreurs. Mais elle repart aussi et la vie continu.


Ce roman est envoutant par son écriture et l'ambiance qui s'en dégage. Le temps suit un rythme qui lui ait propre, il s'étire ou au contraire s’accélère. L'espace lui est réduit. On ne quitte pas Antan et ses environs. Certains personnages partent puis reviennent mais en leur absence c’est presque comme si ils n'existaient plus. La vie est ici, dans ce coin de campagne emprunt de croyances et d'anecdotes.


Si l'on suit principalement une famille de meunier sur trois générations, plusieurs autres personnages gravitent autour et apparaissent très régulièrement dans le roman. Il y a la glaneuse, une femme qui vit en marge du village, le mauvais bougre, un homme devenu presque animal ou encore le châtelain Popielski qui se perd à cause d'un jeu étrange. Il forment comme une mythologie à la région, ils semblent ancrés ici. Leur enfants prendront la relève mais aspireront-ils a vivre ici ? Même si le temps s'étire et le mode de vie parait immuable, l’ailleurs appelle de plus en plus les jeunes.



Dormez donc, dormez jusqu'à la mort! cria la Glaneuse en tournant la tête de ce côté. Qu'est-ce qui vous a pris de naître, si c'était pour dormir ?



Le roman est construit en chapitre très courts qui se centrent à chaque fois sur un personnage. Le récit avance lentement, les existences de chacun s’emmêlent les unes au autres et le temps semble se distendre. Tout cela contribuent à l'envoutement du lecteur, à son immersion dans le récit. On voit l’œuvre des années sur les corps et les esprits. On voit passer les peines et les joies. Les guerres traversent les existences en laissant des plaies mais malgré tout le vie continue. Bientôt c’est un souvenir douloureux, une zone sombre dans l'histoire de chacun. Les hommes sont résilients, ils aspirent à l'espoir et au bonheur. Le mystique n’est jamais loin. Les légendes se mêlent aux saints de la bible et aident à structurer et donner un sens à ce qui ne semble incompréhensible. La manière dont la religion est traitée tout au long du texte est très belle.


C’est un conte, une parabole de la vie et du temps qui passe. Même si la culture polonaise est présente il y a quelque chose d'universel dans ce récit, quelque chose qui touche à l'intime et émeut profondément. Ce sont des vies si quotidiennes, si réalistes que le lecteur ne peut qu'être touché. La merveilleuse écriture de l'autrice joue beaucoup à faire surgir l'émotion.



L'homme attèle le temps au char de la souffrance.
Il souffre à cause du passé et il projette sa souffrance dans l'avenir. De cette manière, il crée le désespoir.


Anaïs_Alexandre
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le 27 janv. 2020

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