Plantez-moi un pieu dans le cœur, coupez ma tête, mettez de l'ail sur le tout, je le mérite... Non pas parce que j'ai été vampirisé, mais au contraire parce que je ne l'ai pas été assez.
La légende de Dracula fait que le roman mérite le respect. Bram Stoker n'a pas inventé le mythe du vampire, même pas littérairement, mais c'est à lui qu'on doit toute la mythologie, mythologie qui s'est dépossédée depuis longtemps de l'œuvre d'origine. L'ail, les symboles religieux, le pieu dans le cœur, la transformation en chauve-souris ou en loup... seul petit truc de différent, Dracula de Bram Stoker peut tout à fait sortir en plein jour sans mourir, juste en perdant ses pouvoirs nocturnes... Cette autre caractéristique célèbre vient en fait de l'immense réalisateur allemand, Friedrich Wilhelm Murnau, avec son brillant film, Nosferatu le vampire (adaptation officieuse du roman, ce qui était pour répondre à l'intention noble d'éviter de payer des droits d'auteur !)... Mais bref, quand on dit "vampire", on pense immédiatement Dracula...
Bon alors qu'est-ce qui cloche avec ce roman ?
Pas la première partie qui est incontestablement excellente, Jonathan Harker coincé dans le château du comte en Transylvanie, angoissante à souhait, avec un fort moment d'érotisme trouble lors de l'apparition des trois maîtresses vampires du propriétaire des lieux. De très loin, la meilleure partie du tout...
Après, c'est décevant... On va avoir le droit aux lamentations de l'autre cruche de Lucy sur plus de cent cinquante pages... et paf, quand elle devient vraiment intéressante, c'est-à-dire quand elle est une morte-vivante vampirisée, il faut que l'autre abruti de Van Helsing et les trois prétendants, sans personnalité et d'une fadeur impressionnante (excepté le Docteur Seward et uniquement quand il est en lien avec un des patients de son hôpital psychiatrique Renfield, seuls passages un minimum intéressants hors-première partie !) et qui auraient pu être regroupés en un seul personnage, la zigouillent.
Van Helsing, le grand ennemi de Dracula, le type qui ouvre sa gueule pour ne rien dire, si ce n'est "oh madame Harker... oh, vous êtes très intelligente... oh, comme je suis trop macho, et bien que ce soit la plus dégourdie du groupe, ce qui n'est pas difficile non plus, je vais écarter Mina Harker de la traque du vampire" et quand il peut dire quelque chose d'intéressant sur la traque du vampire et qui pourrait rendre plus efficace cette dernière "oh bah, je vous le dirai plus tard parce que j'ai décidé d'être un personnage saoulant jusqu'au bout". Quant à Jonathan Harker, si c'est un narrateur intéressant dans la première partie, après, il tombe dans la même fadeur que les autres personnages...
Ah oui, narrateur, oui parce que l'ensemble est composé d'extraits de journaux intimes. Procédé littéraire qui aurait pu être efficace si tous les personnages n'avaient pas exactement le même style, ce qui n'arrange pas la fadeur ambiante. Style qui contamine même le seul article de journal du roman, qui relate le naufrage qui amène Dracula sur les côtes anglaises, et ne le rend pas très crédible, trop littéraire, pas du tout journalistique pour cela...
Quant à Dracula, autant, il était vraiment prometteur dans la première partie, autant (même en partant du principe que plus un personnage est mystérieux, plus, il peut être angoissant !), il est trop en retrait par la suite. Et sa mort est franchement décevante, surtout après une quantité de pages hyper-redondante sur sa traque, allant de l'Angleterre jusqu'à son château.
En résumé oui, au mythe, très mitigé sur le roman...