Marceline Loridan-Ivens a 86 ans. Documentariste bien connue, elle a été déportée à Auschwitz-Birkenau avec son père en avril 1944, arrêtés par la Milice française dans le Vaucluse, où ils vivaient en famille dans une grande maison qu'il avait acheté en 1941.
Ce texte bouleversant s'adresse à son père, qui n'est pas revenu d'Auschwitz. C'est un texte intime où elle raconte l'horreur quotidienne des camps, vécue et difficilement surmontée, et, malgré tout, la volonté de vivre après, de surmonter sans jamais pouvoir oublier, sans jamais pouvoir combler l'absence de son père aimé, avec lequel elle continue à converser tout au long de sa vie.
Ce n'est pas un livre de plus sur l'expérience d'Auschwitz : c'est le récit d'une expérience humaine sur comment résister au mal, comment vivre après, avec la mémoire de ces moments de souffrance atroce et avec l'incompréhension des autres, de ceux qui n'ont pas connu cet enfer. La force morale de l'auteur impressionne, celle qui après la guerre lui permet de déployer une curiosité insatiable du monde, de s'impliquer dans un travail de documentariste, de s'engager politiquement. Marceline Loridan s'interroge dans la dernière partie du livre sur la possible résurgence de tels phénomènes de massacre de masse, de l'antisémitisme, persuadée que leur récurrence fait partie de l'histoire humaine.
Texte sombre, texte grave, texte profond, sans pathos ni complaisance, l'auteur nous invite à une réflexion sur la présence de la barbarie dans les sociétés humaines, sur ses effets sur les trajectoires individuelles. Ce beau livre nous met en garde sur les possibilités d'une résurgence de ce type de barbarie. Il est dans ce sens un appel à la responsabilité individuelle, à l'engagement de chacun pour en prévenir le retour.
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