La France s'est effondrée en trois jours, livrée aux assassins qui tiennent les rues, aux chiens de guerre qui terrorisent les campagnes. Partout le silence des réseaux détruits. Et partout la violence.
Guerilla, le temps des barbares est un roman dystopique publié par Laurent Obertone en 2019. Les actualités intérieure et internationale sont toujours une source d'inspiration de premier choix pour l'auteur du diptyque.
Les évènements de ce roman s'inscrivent dans la foulée de Guerilla Le jour où tout s'embrasa publié en 2016.
https://www.senscritique.com/livre/Guerilla_Le_jour_ou_tout_s_embrasa/critique/249281141
Laurent Obertone articule sa narration autour des survivants de son premier roman (Le docteur Cachet, blessé, paraplégique et plus réactionnaire que jamais, Eva Lorenzino, son miroir inversé ultra progressiste et humaniste devenu son infirmière, Vincent Gîte le tueur identitaire solitaire, Alice qui a accouché de son nouveau né dans un hopital envahi par des terroristes, le colonel accompagné d'une petite fille qu'il a recueilli (...)). De nouveaux personnages font leur apparition (Donatien, le métrosexuel maltraité par sa femme Olympe, vegan et féministe, le capitaine Danjou qui, retranché dans le P.O.P.B avec ses 12 hommes, va résister aux assauts de centaines d'hommes du Califat...).
A propos d'Olympe:
"Olympe, sa femme – ou plutôt la personne en situation non-contraignante de flexi-union avec lui –, l’avait suffisamment mis en garde quant à son attitude inappropriée vis-à-vis des racisés."
Comparé au premier tome, Le temps des barbares est moins pamphlétaire même s'il est plus violent et plus dystopique que son prédécesseur.
"Ce pays maudit marchait depuis bien trop longtemps sans son âme, sans seulement savoir où, sans comprendre son agonie."
Une société post apocalyptique
Les 25 jours qui suivent l'implosion de l'Etat ont un air de jour d'après et de société post apocalyptique. Ils donnent lieu à des exactions en tout genre sur l'ensemble du territoire, un retour à la vie normale semble tout à fait exclu. Le roman commence par l'exécution massive et spectaculaire d'hommes blancs "raflés" par les hommes du Califat. Les "kouffars" à la file indienne doivent se jeter du sommet d'une tour sur une plaque de béton, quelques dizaines de mètres en contrebas.
"La raison d’être du contestataire, c’est son ennemi, l’État. Mais si l’ennemi meurt pour de vrai, le contestataire n’est plus rien. Il meurt avec lui. "
Les islamistes qui ont massacré les habitants d'un village en les brûlant dans une église se perdent dans la campagne en proie à un hiver impitoyable. Ils échouent dans une station essence, perdue au milieu de nulle part. Ils trouveront le moyen de l'incendier en voulant se réchauffer et demeureront définitivement prisonniers de cet Enfer blanc...
Alice a retrouvé son mari Cedric par miracle. Cloitrés dans leur pavillon avec leur bébé, ils sont assiégés par une meute de voisins affamés.
Eva Lorenzino et le docteur Cachet ont été recueillis par un groupe survivaliste savoyard retranché dans les montagnes qui fait passer sa sécurité avant les principes de la convention de Genève.
Les gangs s'affrontent dans Paris et sa banlieue: africains "biscornus" contre albanais.... Pendant ce temps, c'est un certain Escard, chef du renseignement, qui "tient les rênes" du pouvoir, retranché dans le chateau de Vincennes. Cynique et calculateur, le haut fonctionnaire a donné des consignes pour laisser le pays d'enfoncer dans le chaos afin de pouvoir jouer les hommes providentiels et récolter la "mise" le moment venu.
Regard critique
Derrière l'outrance de la dystopie, Laurent Obertone égratigne toujours avec ironie et brio la dérive progressiste de l'Occident. Les communautés féministe, vegan, transgenre, leur radicalité et les incohérences de certains de leurs combats, sont tournés en dérision. C'est ainsi que Raoul(.e), un transexuel bipolaire, se trouve contraint(.e) et forcé(.e) d'effectuer des fellations à une bande de jeunes en plein bois de Boulogne...
A titre d'exemple, la France "archipélisée" en proie aux minorités est ainsi décrite:
« Réservé aux personnes LGBTQIA2+ », puis on avait ajouté : « Et personnes racisé.e.s minoré.e.s », puis : « Et non-valides et atypiques », puis : « Et femmes », et on avait finalement rayé le tout au marqueur rouge pour écrire : « Entrée interdite aux mâles blancs valides psychotypiques hétéro-binaires non-fluides », mais de sulfureux militants anti-assignation prétendaient que nul ne devait se réduire à des cases, et que désigner et catégoriser c’était déjà stigmatiser. "
Partisane du très bien vivre ensemble contre vents et marées, la gente féminine n'est pas épargnée par l'auteur.
"Les hommes pensent mais ne parlent pas. Les femmes font le contraire."
Nous sommes en 2028, certaines places et rues de Paris ont été rebaptisées Apathie, Hidalgo, Pulvar ou Schiappa...
Plus violent et radical que Guerilla le jour où tout s'embrasa, Le temps des barbares est un ouvrage efficace et addictif de fiction dystopique, mâtiné de réflexions critiques souvent pertinentes sur notre époque.
La fin de ce deuxième volume ouvre la porte à un troisième volet que je vois bien sortir en 2022...
Pour conclure, comment ne pas évoquer les dernières lignes du roman qui se terminent par ces quelques mots de l'auteur:
Je dois enfin vous remercier, ô lecteur, qui me permettez d’exister,
et assurez autour de vous ma publicité, quitte à ruiner vos chances de
figurer un jour au conseil de surveillance du journal Libération. Pour
vous j’irai au fond des enfers, et je sais qu’à la lueur de votre
sourire s’effaceront tous les sacrifices.
Ma note: 8/10