Il a fallu que je lise La Curée de Zola, étant intéressé (un peu) par l'architecture. J'avais déjà lu Huysmans râler sur, je cite, l'américanisation de Paris, avec de grandes allées propices à la circulation des engins. Tous les grands travaux se font aux dépens du charme (anagramme de marche) du vieux-Paris, les petites ruelles entortillées, plein de recoins, de cul-de-sac. Et puis, bien sûr, le Paris d'aujourd'hui regorge d'anecdotes historiques sur la rouerie d'Haussmann, qui si mes souvenirs sont corrects est allé jusqu'à vendre des rues avec juste des belles façades, comme un décor, pour s'en mettre plein les poches.
Bref, tout cela avait de quoi me rendre curieux de lire un roman de Zola dont c'est plus ou moins le sujet. Là-dessus, je dirais qu'il y a deux lignes directrices. Une ascension sociale assez fascinante dans ce qu'elle a de mépris pour les moyens, avec un beau portrait de la rouerie et du copinage des arrivistes.
Et puis une trame plus sentimentale, qui est liée à la première, qui fait énormément penser au mouvement décadent, notamment dans les descriptions de fleurs vénéneuses, de bijoux, mais aussi dans l'affadissement de l'existence, une certaine fébrilité ou fragilité des nerfs, etc. Le style m'a paru très abouti, très beau, et les descriptions moins ennuyante et répétitive que dans Le ventre de Paris. C'était un plaisir !
J'aurais juste une réserve, c'est que Zola, pour sa composition d'ensemble, fait d'un personnage une victime, qui, si il y a effectivement un vécu derrière, du moins n'a jamais été présenté comme ça tout le long du roman, et on se retrouve à plaindre ce qui s'avère au dernier moment, pour créer un peu d'émotion, une petite chose fragile qui n'avait pas le choix de faire n'importe quoi de sa vie. Cela aurait pu être mieux préparé...
En bref, c'est un excellent Zola sur les magouilles des grands travaux de Paris, avec une touche de décadentisme. Si l'idée de commencer cet auteur par un roman vous intimide, je vous invite à vous renseigner sur les Nouvelles noires ou roses.