Jean-Jacques Rousseau est une véritable machine infernale capable d'avaler n'importe quel lecteur contemporain et de le subjuguer à travers les idées énoncées dans ses romans. Ici, la relation sentimentale entre un professeur de philosophie particulier (!) et une fille de notable Suisse lui sert de toile de fond d'abord pour expier des formulations plus dramatico-romantique que tout ce qu'un esprit du XXIème siècle – bercé par l'immédiateté et l'égocentrisme, ne saurait même imaginer (et je pèse mes mots) – puis dans un second temps, cette toile de fond lui permet d'articuler ses opinions sur différents sujets (l'honneur, les bonnes moeurs, les envies de suicides...) grâce à ces deux personnages fort intelligents.
Ces joutes épistolaires sont peut-être des prétextes à la réflexion, mais elles semblent pourtant si vraies qu'on s'attache bien vite aux personnages ! Le professeur et amant de Julie, qui restera anonyme, semble un peu benêt et complètement submergé par l'amour qu'il éprouve pour son élève. Cette dernière n'hésitera pas à prendre l'ascendant sur son supérieur prétendu pour lui réexpliquer, et donc nous expliquer, tout ce qu'il lui avait appris puis oublié du fait de sa folie amoureuse.
PS : Et, quoi ? Dans le texte issu de la réécriture de Gennequin Ainé, ce dernier (je pense ?) n'hésite pas à donner son avis de pilier de comptoir du PMU bourgeois du XIXème siècle sur les personnages (en nous disant qu'ils sont fous), il nous raconte son enfance comme si nous lisions ce livre pour lui. Il prend à partie le lecteur pour lui dire qu'il aurait bien mauvaise opinion de ceux (sic) qui ne devineraient pas tel ou tel élément de l'intrigue. Sans compter les nombreuses fois où il nous spoile éhontément ! Sapristi, les manières d'il y a 150 ans n'étaient clairement pas les mêmes qu'aujourd'hui !